mercredi 8 septembre 2010
L’infanticide: "preuve extrême de la logique de violence du judéo-christianisme" ?
Je dédie ce billet à la mémoire de Rachel Corie.
«Celui qui portera atteinte à un enfant… il serait mieux pour lui qu’on lui attache autour du cou une meule de pierre et qu’on le jette dans la mer.»
Jésus – Evangile selon Saint Marc (9 -42)
L’honneur d’un capitaine
Iman al-Hams avait 13 ans.
Portant son sac à dos, elle se dirigeait vers son école, ou du moins le tas de ruines qui lui sert d’école. Comme chaque matin, obligée de passer non loin d’un de ces postes de contrôle de la soldatesque d’occupation, à Rafah. Implantés par dizaines avec leurs miradors, dans cet immense camp de concentration qu’est la bande de Gaza. Elle marchait, pressant le pas, à une centaine de mètres du fortin.
A son passage, des coups de feu claquent. Quelqu’un s’est amusé à faire un carton sur elle. Blessée, terrorisée, elle a eu l’énergie suffisante de vider son sac à dos pour prouver qu’elle n’était porteuse d’aucune bombe. Essayant de s’éloigner de la scène.
L’auteur des tirs : le capitaine “R”. (1)
Les troupes d’occupation prennent soin de dissimuler l’identité des auteurs de crimes contre l’humanité.
L’impunité. Assumée par La Communauté Internationale
Ce capitaine est sorti du poste, lui a tiré deux balles dans la tête, à bout portant. Estimant cela insuffisant, après s’être retourné, il a vidé le reste de son chargeur.
Criblée de 17 balles.
Fier de son acte, disant à ses hommes: «Tout ce qui est mobile, tout ce qui bouge dans cette zone, même un enfant de trois ans, doit être tué». (2)
Mais, il y a eu de nombreux témoins. Ce cas est devenu un symbole aussi fort que celui de l’assassinat de Rachel Corie, effectué lui aussi à Rafah. Un simulacre de justice a donc été organisé devant un tribunal militaire.
On a visionné les vidéos et écouté les enregistrements des communications échangées entre militaires. Dès le début, le capitaine "R" savait que c’était une enfant, terrorisée, d’après les commentaires des soudards placés sous ses ordres. Elle ne menaçait personne, ne commettait aucun forfait.
La jouissance de l’infanticide.
Le tribunal a blanchi ce capitaine. Confirmant qu’il n’avait pas fait un usage illégal de son arme, bla-bla-bla…
The Guardian a eu le courage de revenir sur les conclusions de ce procès, cette semaine. Car il témoigne de tout ce que subit la région, depuis des décennies: Liban, Palestine et Gaza, Irak, Afghanistan.
Mais pourquoi avoir adopté ce titre pour mon billet ?
Cet infanticide, acte de barbarie, n’a rien à voir avec le judéo-christianisme. Ce rapprochement, cet amalgame, sont totalement stupides. Je le concède.
Rien à voir avec la religion: ce n’est que l’expression, dans sa “violence extrême” de l’idéologie coloniale. Quel qu’en soit l’habillage sémantique: le droit de vie ou de mort exercé par le prédateur, le spoliateur, dont la légitimité, la bonne conscience dans le crime, n’ont pour fondement que la seule supériorité de la force armée. Le livre magistral d’Olivier Le Cour Grandmaison en décortique les fondements : Coloniser – Exterminer – Sur la guerre et l’Etat Colonial. (3)
Souvenons-nous: Victor Hugo notant, au lendemain d’un dîner mondain, les atrocités de l’Armée d’Afrique, comme s’il s’agissait d’une chasse aux perdreaux: «… Algérie, le général Flô me disait hier soir que, dans les razzias, il n’était pas rare de voir des soldats jeter à leurs camarades des enfants qu’ils recevaient sur la pointe de leurs baïonnettes…» (4)
Ou encore les millions de morts et les atrocités des colonisations occidentales sur tous les continents: Afrique, Amérique du nord et du sud, Asie, Océanie - Pacifique… Ce n’est pas une logique religieuse qui en est la source. Mais, l’enrichissement facile d’une caste de privilégiés ou d’une mafia. Ce qui revient au même.
Vol, prédation, meurtre sont condamnés par toutes les religions. Certes, les religions, comme toute croyance et l’athéisme n’y échappe pas, servent d’habillage moral aux idéologies les plus dévastatrices. Ce qui est totalement différent.
J’ai effectivement repris une des techniques favorites de la désinformation, en miroir, sous forme du titre d’un texte publié par un “intellectuel musulman”, Abdennour Bidar, “professeur de philosophie”, paru dans le quotidien Le Monde du 30 août dernier (5): «La lapidation, "preuve extrême de la logique de violence de l’islam"»
Pour montrer l’impact, les ravages, la portée de cette lèpre intellectuelle: «l’amalgame». Une des armes les plus efficaces de la désinformation.
«L’amalgame»: surtout ne pas établir de nuances entre un régime, un peuple, une religion. Se donner bonne conscience dans la diabolisation de “l’Autre”…
Car, il y a longtemps que je n’avais pas lu de texte, en français, aussi boursouflé d’inculture, d’ignorance, d’obscurantisme, d’imbécillité. “Extrême”… En un mot, de fanatisme.
Depuis les écrits islamophobes d’un autre “professeur de philosophie”, Redeker, décoré pour cet exploit de la légion d’honneur et recruté à grandes trompettes au CNRS...
Libre à “cet intellectuel musulman” de penser et d’exprimer son rejet de la religion musulmane, n’y voyant que "violence" dans ses fondements, ou ses "piliers" suivant l’expression consacrée: prières, pèlerinage à la Mecque, Ramadan ou carême. Il n’évoque pas les deux autres piliers: l’aumône de solidarité, la zakat, ni la profession de foi…
Mais se prétendre “intellectuel musulman” et procéder à «l’amalgame» entre lapidation et Islam. Alors qu’on sait, que cela est inexistant dans Le Coran… Dans le climat ambiant de “racisme d’Etat”, pour reprendre la formule de Michel Foucault, qui imprègne la France et l’Occident dans son ensemble, d’islamophobie délirante, il faut être d’une totale malhonnêteté intellectuelle.
Au prétexte de s’insurger contre une condamnation à la lapidation, en Iran. Evidemment. Qui ne serait pas indigné ?...
J’ai découvert la lapidation dans un film poignant, tragique et, néanmoins, débordant de vitalité, Zorba le Grec. Magnifiquement interprété par Anthony Quinn et Irène Papas, dont l’action se passe dans l’île de Crète. En Europe, dans un des berceaux de la civilisation gréco-romaine, au 20° siècle... (6)
Scène terrifiante: Irène Papas y joue le rôle d’une veuve qui vit une passion pour un étranger et meurt lapidée par les villageois, hommes et femmes, tous chrétiens, pour ne pas avoir respecté les convenances sociales et les règles non écrites du clan…
Il ne viendrait pas à l’idée, une seule demi-seconde, de diaboliser le christianisme et son fondateur Jésus pour autant. Jésus ayant lui-même condamné la lapidation en usage dans les tribus juives, par son célèbre: «que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre». (7)
De là, à diaboliser l’Islam qui considère Jésus (Aïssa) comme un des grands prophètes de La Révélation…
Une louche pour un Secrétariat d’Etat
Je sais, nous savons, que l’islamophobie ouvre toutes les portes, à double battant: stations de radio, plateaux de télévision, maisons d’édition, presse et magazines. A la notoriété. Aux honneurs. Flatter le populisme, le racisme c’est le sésame de la gloire. En rajouter quelques louches dans la provocation peut même obtenir un strapontin dans un gouvernement: Secrétaire d’Etat…
A lire les commentaires des lecteurs à la suite de l’article, célébrant “le courage de cet intellectuel musulman”, on en resterait tétanisé si on n’était blindé contre la bêtise, la violence, la haine, populacières. Le défoulement orgiaque du piétinement de "l’Autre". Se croire supérieur, dans l’arrogance. Apaiser ses frustrations, des humiliations subies. Ah! Si on pouvait revivre les ratonnades, les lynchages, impunis de nos aïeux…
Le degré zéro de l’intelligence.
Il ne s’agit pas dans ce billet de faire œuvre, en quelques lignes, de théologien ou d’historien des religions. Encore moins, l’apologie d’une religion ou d’un quelconque prosélytisme. Simplement, exercer son esprit critique dans le respect de la Connaissance ou du Savoir, de la Culture, de la Raison, de la Tolérance.
Dans le pamphlet provocateur d’Abdennour Bidar, nous retrouvons les trois tares, les trois dénis, qui plongent l’Occident dans la régression intellectuelle menant droit à l’obscurantisme:
1) Déni de la réalité : l’hyperviolence de l’Occident
Un des thèmes majeurs de l’islamophobie est la prétendue “violence de l’Islam”. Mais prendre un atlas géographique, c’est constater que les bombardements, tueries, massacres, tortures, occupations, se déroulent en terre d’Islam. Au quotidien. Et, non pas le contraire.
Violence infligée par des forces armées occidentales, ou judéo-chrétiennes pour reprendre la typologie d’un Bidar. Et, non pas le contraire.
Des centaines de bases, navales, aériennes, terrestres, des milliers d’hommes, des milliers de mercenaires, implantés en Terre d’Islam. Des centaines de bateaux de guerre au large des côtes. Jusqu’à plus de quarante nationalités occidentales différentes en Irak ou en Afghanistan. Et, non pas le contraire.…
En fait, l’Islam a connu la violence des occupations occidentales depuis les croisades.
Il est frappant de constater que les musulmans ont laissé en terre d’Espagne des jardins et des palais magnifiques, des systèmes d’irrigation perfectionnés (la fameuse Huerta de Valencia et son Tribunal des Eaux), après avoir fondé parmi les premières universités européennes. La bibliothèque de Cordoue, au Xè siècle, contenait 400.000 ouvrages. Alors que les occidentaux n’ont laissé, à la suite de quatre siècles d’occupation, dans les anciens royaumes francs de Palestine et de Syrie que des châteaux forts…
Depuis le dépeçage de l’empire Ottoman à la suite de la première guerre mondiale, du fait de son alliance avec les Allemands, c’est encore pire. Tous les pays producteurs de pétrole et de gaz, au Moyen-Orient, ont été asservis par l’Occident. Au passage, les producteurs de pétrole musulmans en Asie (8) l’ont été aussi. Invasions, dictatures, autocraties policières imposées via des monarchies d’opérette ou des républiques de marionnettes.
Imposant dans son emprise impériale une règle: si un pays devient trop puissant économiquement, ou manifeste des velléités d’indépendance, on l’étouffe. La ministre des affaires étrangères US, Madeleine Albright, n’avait pas hésité à justifier la mort de 500.000 enfants irakiens lors de l’embargo inhumain précédant l’invasion.
Ou, on le brise. En mille morceaux. Jusqu’à raser intégralement un pays sur fondement de mensonges, comme l’Irak. Avec 1,5 millions de morts, des millions de blessés et de traumatisés. De même pour l’Afghanistan.
Violences dont on n’entend jamais parler. Encore moins par “les intellectuels musulmans” médiatisés par notre appareil de propagande. Vous en avez-vu ou entendu un, un seul, s’insurger?...
Pas plus que des atrocités en Palestine et du camp de concentration de Gaza, surnommé pudiquement par La Communauté Internationale: «blocus»… Destructions planifiées dont on menace l’Iran. D’où la nécessité de noircir ce pays à profusion, avant de le carboniser.
Le niveau de notre hyperviolence, prédations, spoliations, est tellement intolérable à l’intelligence, à quiconque possède un embryon de “valeurs”, qu’il est indispensable de le justifier en permanence. Ne serait-ce que pour soulager notre inconscient collectif. Notre propre lâcheté quotidienne. Car, ne pouvant dire que nous ne savons pas, nous en sommes réduits à «nier» cette violence. A nous mentir, à nous-mêmes.
La logique est toute trouvée: les “violents”?... Ce n’est pas nous! Ce sont les autres!... On les pille, on les massacre s’ils résistent, parce qu’ils sont violents, fourbes et cruels. Intrinsèquement. Viscéralement. C’est leur religion qui les met dans cet état…
Nous, nous ne connaissons pas, n’exerçons jamais la violence: nous sommes des civilisateurs!
Nous propageons la civilisation, la démocratie, les droits de l’homme, les droits de l’animal.
Si nous tuons, torturons et occupons c’est parce que les barbares, sauvages, sous-développés, cannibales (grand cliché de nos expéditions coloniales en Océanie et en Nouvelle-Calédonie), ne comprennent pas les bienfaits que nous leur apportons.
Ce déni de la réalité, quant à notre hyperviolence d’occidentaux, a même contaminé, sous l’effet de notre “habitus colonial” tout notre système de pensée, de conception du monde et de son devenir. Allant jusqu’à gangréner la “laïcité”.
D’un modèle d’organisation sociale garantissant le respect de chaque croyance, y compris athée, dans la neutralité politique, la “laïcité” est, à présent, instrumentalisée comme vecteur de haine religieuse, de propagande islamophobe. Par des campagnes de diabolisation récurrentes faisant apparaître l’Islam comme une menace pour nos sociétés, et donc pour le reste du monde.
Justifiant ainsi nos pillages, expéditions et aventures militaires, neutralisant, dans le même temps, tout esprit critique quant aux violences exercées à l’encontre des pays à majorité musulmane.
2) Déni de la Connaissance : le culte de l’ignorance
Fanatiser les foules commence toujours par “le culte de l’ignorance”. Déformer, désinformer, occulter. Dans le cas de l’Islam, martelant une vision formatée, hallucinée, depuis les croisades.
A la source d’une des plus brillantes civilisations que l’humanité ait connue, voilà une religion ravalée à de grotesques stéréotypes. Du sauvage, le couteau entre les dents, ou la bombe dans le turban. Des pans entiers de connaissances sont ainsi cachés, tus par une censure qui ne dit pas son nom, pour laisser le monopole du discours aux propagandistes.
Cette vision fantasmée, projetée, d’une violence supposée être l’essence même de l’Islam, s’est accentuée depuis la deuxième guerre mondiale et l’aggravation des prédations, notamment des richesses énergétiques, dans les pays musulmans. Avec des moyens considérables dans cette désinformation: documentaires, films, romans, ouvrages dits “spécialisés”, etc.
Toutes les sommités, de la recherche sur les civilisations et les religions, de la pensée, parmi les non-musulmans, qui ont fait l’effort de franchir la barrière de l’idéologie coloniale, ont pourtant témoigné de leur profond respect pour une religion qu’ils considèrent comme un patrimoine spirituel essentiel de l’humanité.
Leurs textes, leurs recherches, leurs ouvrages, sur l’Islam, résultats d’années et souvent de toute une vie d’étude, sont évidemment soigneusement maintenus dans l’oubli. Je cite quelques uns de ces auteurs, chaque fois que j’en ai l’occasion, pour rompre ce mur du silence, cet étouffement de la désinformation.
Je ne m’en lasserais pas, inviter à lire ou parcourir leurs œuvres pour ceux qui veulent partir à la découverte du monde, de la culture et de la pensée face à la transcendance: Jacques Berque, Henry Corbin, Louis Massignon, Denise Masson, Edward Saïd, Frithjof Schuon, pour me limiter aux plus grands…
Tous, qu’ils soient agnostiques, athées, catholiques, protestants, ou panthéistes (je pense à Schuon achevant son parcours spirituel, de l’Hindouisme à l’Islam, au sein des communautés amérindiennes d’Amérique du nord), ont été impressionnés, par la richesse spirituelle et la sérénité de l’Islam.
Certains d’entre eux, d’une personnalité, d’une culture, d’une richesse de vie, exceptionnelles, se sont même convertis à l’Islam: Vincent Monteil, ancien militaire, chercheur, voyageur, hors du commun; ou, René Guénon, dont l’ouvrage bien connu, parmi des dizaines, La Crise du Monde Moderne est à relire, terminant sa vie au Caire où, on venait le consulter d’Europe et du Moyen-Orient, en tant que maître spirituel. Un mausolée imposant lui a été édifié dans le cimetière de Darassa.
Evidemment, en dimension intellectuelle, nous sommes loin de ces acrobates de la manipulation, propagandistes islamophobes, déguisés en "intellectuels musulmans", "iraniens dissidents", (9) recrutés pour venir déblatérer sur l’Islam, aux cotés du maronite de service (10), parce qu’il se présente “arabe”, censé expliquer cette religion aux judéo-chrétiens européens…
De la soupe qu’ils nous servent que retenir, si ce n’est qu’il faut absolument, impérativement, urgemment, «réformer l’Islam» (sous leur gouverne, bien sûr), mais surtout pas l’Occident, modèle de perfection?... Mais, comment réformer le Diable en personne?...
Aller au-delà de cette bouillie d’ignorance et d’obscurantisme est, toutefois, facile. Nul besoin d’être musulman pour comprendre cette religion, qui représente, qu’on le veuille ou pas, une des principales de la planète. Un peu d’honnêteté et d’ouverture intellectuelles permettent de saisir immédiatement les clés de compréhension du Coran et de l’Islam.
Deux sont fondamentales.
La première: La Compassion. Le Coran, ce sont 114 sourates qui commencent toutes par: «Au nom de Dieu, Le Compatissant (ou Le Bienfaiteur suivant les traductions - Régis Blachère), Le Miséricordieux».
D’entrée, il n’est même pas fait allusion à Sa Toute-Puissance. Dieu, dans le Coran est avant tout: havre de paix, de compréhension, de pardon, de réconfort, d’affection.
La seconde: Le Soutien dans l’épreuve. Y compris dans la faute. Toute faiblesse humaine, est pardonnée si le repentir est formulé avec le souhait de s’améliorer, dans le choix de “la voie montante”, comme le recommande poétiquement Le Coran. Qui est celle d’être bon, en veillant à faire le bien autour de soi.
Ce qui explique, mais encore faut-il lire les textes, que toute menace de châtiment, sans exception, est immédiatement contrebalancée par le soutien affectueux: « …mais, il lui sera pardonné s’il se repend».
Les islamophobes, et autres fanatiques, oublient toujours, curieusement, le deuxième terme de l’énoncé… L’Islam n’est pas une religion de la culpabilité et du châtiment.
Bien sûr, à partir de cette entrée s’ouvre la vertigineuse galaxie de la spiritualité et du mysticisme, des siècles, des milliers d’ouvrages, des plus grands penseurs et mystiques. Allant de la lecture “exotérique” du Coran, son premier sens apparent, jusqu’à “l’ésotérique”, la recherche du sens caché des paroles lues, que les maîtres de la méditation se transmettent après des années d’étude…
Pour ce qui est du “libre choix”, il n’est pas nécessaire d’avoir un super quotient intellectuel pour comprendre qu’une religion qui n’est pas fondée sur la liberté de conscience n’a aucune valeur, encore moins une chance de durer. Ce que rappelle le Coran: « …nulle contrainte en religion» (sourate 2 – verset 256).
Quant à l’inusable cliché raciste fantasmant sur “le sabre” qui aurait imposé l’Islam, c’est dissimuler que les pays où les musulmans sont les plus nombreux, comme l’Indonésie (250 millions d’habitants dont 85% de musulmans – autant, si ce n’est plus, que la totalité du monde arabe), ou les plus éloigné de la Mecque comme la Malaisie, n’ont jamais vu un guerrier venu d’Arabie. L’Islam s’est paisiblement diffusé par les commerçants…
Contrairement aux assertions des islamophobes, toutes discussions, confrontations sur les idées religieuses, les débats théologiques, sont les bienvenus, recommandés, même, notamment avec les gens du Livre, autrement dit de La Révélation: juifs et chrétiens. Seule “la légitime défense” est admise dans Le Coran, quand la communauté est attaquée, persécutée, “physiquement”, pour sa croyance.
«Réformer» l’Islam ?... C’est, en premier lieu, à l’Occident de se «réformer».
Il faudrait d’abord que les pays musulmans vivent dans la liberté.
Démanteler toutes les bases militaires occidentales dans leurs pays, des centaines, et leurs centres de tortures. Retirer toutes les troupes étrangères qui pullulent. Eradiquer tous les mercenaires, “escadrons de la mort” privatisés, services spéciaux étrangers manipulateurs de gangsters-terroristes (11), qui infestent leurs contrées. Retirer le soutien aux dictatures. Arrêter le pillage de leurs ressources et de leurs patrimoines (y compris les “privatisations” bradées et spoliatrices…).
Afin que ces pays vivent en paix, dans le libre choix du mode de gouvernement qu’ils souhaitent; dans le respect de leur autodétermination, sans interférence des occidentaux; dans l’exploitation de leurs ressources s’intégrant aux échanges commerciaux internationaux, sans confiscation ni vol des multinationales imposées par l’Empire.
Ensuite, dans l’apaisement, ils seront libres d’arbitrer les équilibres entre religion et société qui leur conviendront, sans que nous ayons à donner des leçons “haut et fort”, dans l’arrogance de notre hyperviolence.
Mais, de cette «réforme» radicale, l’Occident en est incapable. Muré dans sa violence de prédateur.
De toute façon, quel que soit le temps nécessaire, les pays musulmans obtiendront leur totale indépendance et retrouveront dans une Renaissance, qui s’annonce déjà dans certains pays, leur splendeur passée qui nous a tant apporté dans les arts comme dans la pensée.
3) Déni de l’Altérite: le mépris de “l’Autre”
Il est vrai que l’ignorance, ce boulevard de l’obscurantisme, permet, dans la bêtise, le mépris de “l’Autre”, avec un double avantage:
=> entretenir ce sentiment de peur, qui ravage la France comme ses voisins, nécessaire à nos gouvernants pour “tenir” une opinion publique
=> entretenir ce sentiment de supériorité permettant aux “bonnes consciences” d’ensevelir tout sentiment de culpabilité face aux horreurs que nous commettons.
La haine de l’Islam, qui s’est substituée à celle du “communisme international” chez beaucoup, est d’autant plus virulente qu’il représente une extraordinaire force identitaire, collective, partagée, permettant à toute la communauté des musulmans de résister aux coups de boutoir de la répression, de la guerre, du pillage, ravageant la plupart de leurs pays. En dépit d’élites ou de “leadership” défaillants.
On comprend d’autant mieux que le Ramadan, ce mois de carême très pratiqué, soit une cible privilégiée des services de propagande islamophobe. Il est la démonstration éclatante de la solidarité collective entre membres de toute une communauté. Facteur aggravant: de dimension internationale…
Ce sentiment de mépris, dans la diatribe de cet “intellectuel musulman”, accable ainsi des centaines de millions de femmes et d’hommes dont beaucoup ont certainement un niveau de culture, d’intelligence, de formation, d’expérience, et d’humanisme, que lui-même est loin de démontrer. Affirmer que des millions de personnes soient incapables d’exercer leur libre arbitre, soumis docilement à une violence religieuse… C’est n’avoir jamais vécu ou partagé ces moments de sérénité, de joie au milieu de familles puisque le mois de Ramadan est souvent l’occasion de retrouvailles. Lors des veillées, après la rupture du jeune, de séances de cartes, de rires, de discussions animées, entre parents, amis, voisins…
Pour un musulman, le Ramadan est une communion avec ceux qui ont faim et soif. Une prière silencieuse avec ceux qui souffrent. Et, une action de grâce, en remerciements des bienfaits qui nous sont accordés, de pouvoir manger à notre faim, et boire quand on le désire.
Il est amusant de repérer les logiques de la mauvaise foi des islamophobes.
Si pour un musulman, le fait de manger sous le nez d’un autre musulman dans un acte provocateur, dans une attitude d’insulte, est “indécent”, où est le problème?... Celui qui ne jeûne pas, n’a qu’à le faire chez lui ou dans la discrétion, en respectant ceux qui le font. Là, subitement, nous sommes dans l’atteinte aux libertés.
Dans les zones touristiques, en Europe et en France, des municipalités exigent qu’on soit vêtu, avec ordre à la police de verbaliser en cas de refus, pour déambuler dans les rues commerçantes. Trouvant “indécent” de rentrer dans une boutique en maillot ou torse nu. Cela paraît normal, justifié. On se doit de respecter le Veau d’Or…
Difficile, apparemment, pour nos "intellectuels islamophobes", de discerner entre la décence et l’indécence…
Ce sentiment de mépris, élément essentiel de leur fonds de commerce, est pathétique. En retour, ces "intellectuels musulmans" recueillent, au sein des communautés, la compassion exprimée pour un ratage pitoyable: au lieu d’agir en diffuseur de connaissances, en passeurs de culture, dans la tolérance, en rajouter dans la bêtise et le racisme pour être mieux «intégré».
Illustration, une fois de plus ou sous un autre angle, du «choc» que nous vivons. Non pas entre civilisations. Mais, celui d’une idéologie hyperviolente fondée sur le règne de la ploutocratie exploitant des masses de serfs, consommateurs décérébrés. Face à des mouvements de résistance aspirant à un autre monde fondé sur la solidarité et la dignité humaine. Et, l’Islam, malgré la terrible diabolisation qu’il subit, représente aujourd’hui une des forces d’opposition les plus massives et résilientes.
Je salue, donc, le courage et l’infinie patience des musulmans, dont je me sens solidaire, dans ce combat de Titans…
Le Ramadan va s’achever dans quelques jours.
Je souhaite à tous les musulmans, du moins à ceux qui seront en mesure de la vivre pensant aux victimes actuelles des calamités naturelles ou guerrières, une excellente fête d’Aïd Sgheir. Une des plus belles fêtes de convivialité familiale et amicale, que j’ai eu, et que j’ai, souvent le privilège et la joie de partager.
Et, à "l’intellectuel musulman", Abdennour Bidar, à défaut de la célébrer coincé dans son obscurantisme faisandé, je lui offre pour méditer un de mes versets préférés (Sourate 31 – Verset 19): «Sois modeste en ta démarche! Baisse un peu ta voix. En vérité, la plus désagréable des voix est celle de l’âne».
Georges Stanechy
07.09.10
Notes:
(1) Chris McGreal, non coupable. Le capitaine israélien qui a vidé le chargeur de son fusil sur une écolière Palestinienne – L’officier a ignoré l’état de terreur de l’adolescente – Les autorités militaires confirment que ‘l’acte d’achever’ est une pratique normale), The Guardian, mercredi 16 novembre 2005. Réédité la dernière semaine d’août 2010.
(2) "This is commander. Anything that’s mobile, that moves in the [security] zone, even if it’s a three-year-old, needs to be killed." The Guardian, Op. Cit.
(3) Le Cour Grandmaison, Olivier, Coloniser - Exterminer – Sur la guerre et l’Etat Colonial, Fayard, 2004.
(4) Coloniser – Exterminer, Op. Cit., note 1, p. 98.
(5) Abdennour Bidar, La lapidation, "preuve extrême de la logique de violence de l’islam", Le Monde, 30 août 2010, http://www.lemonde.fr/idees/article/2010/08/30/la-lapidation-preuve-extreme-de-la-logique-de-violence-de-l-islam_1404384_3232.html
(6) Chef-d’œuvre que tout cinéphile se doit d’avoir dans sa vidéothèque: Zorba le Grec, mis en scène par Michael Cacoyannis, sorti en 1964, d’après le roman de Nikos Kazantzakis (1946). Avec la célèbre musique, la danse du sirtaki, du compositeur Mikis Theodorakis.
(7) Evangile selon Saint Jean 8, 1–11.
(8) Les immenses champs pétroliers, et leurs réserves de l’île de Bornéo ont été confisqués aux pays détenteurs (Malaisie-Indonésie) par la création d’un Sultanat en carton-pâte: le Sultanat de Brunei (l’homme le plus riche du monde…). Néocolonie britannique, administrée, en fait, par les compagnies pétrolières occidentales et leurs mercenaires.
9) Les “dissidents iraniens” que nous servent les médias prêtent à rire quand on sait qu’ils ne sont que les rejetons de la nomenklatura corrompue du temps de la sanguinaire dictature du Shah d’Iran, qui a réussi à s’enfuir au moment de la révolution de 1979, avec le magot familial et la protection des services spéciaux occidentaux…
(10) J’en ai entendu un (très médiatique), dans une conférence, prétendre que le Shiisme n’avait rien à voir avec l’Islam. Henry Corbin qui a passé sa vie à étudier et écrire sur le sujet aurait pleuré de désespoir devant autant de nullité…
(11) Exemple: l’attentat-suicide de Quetta, au Pakistan (“condamné” par tous les gouvernements occidentaux…), vendredi dernier, qui a provoqué la mort d’une centaine de personnes et plus de 200 blessés est attribué par la propagande occidentale aux Talibans, par un terroriste mêlé à un rassemblement de Shiites.
Sous-entendu: ce sont des Sunnites qui en sont les auteurs, c’est la guerre civile entre Shiites et Sunnites.
Pour réaliser pareil carnage, il faut qu’un “volontaire au suicide” soit en mesure de porter une centaine de kilos d’explosif et de ferraille sur lui. A Quetta, il fait en ce moment 35° à l’ombre: tout le monde est en sandales et chemise…
C’est tout simplement une bombe télécommandée au passage du cortège, qui était une manifestation pacifique de soutien au Peuple Palestinien organisée par la communauté Shiite de la ville. Personne n’est dupe.
Source: le grand soir
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