mercredi 30 septembre 2009

Vingt heures par semaine, Madame la Ministre ?

Chère Madame Simonet,

le début de cette lettre devrait vous rassurer. Vous allez bientôt réaliser de substantielles économies dans l’enseignement, bien plus sans doute que ce que vous espérez. Et, pour cela, vous n’aurez même pas besoin de vous confronter aux professeurs et aux syndicats. La Communauté française fera des jaloux en atteignant l’équilibre budgétaire avant 2015. Génial, non ?

Pour atteindre vos objectifs, vous ne devrez pas fournir beaucoup d’efforts. Suivez donc la voie empruntée par vos prédécesseurs, saupoudrez-y encore un peu plus de mépris à l’égard des enseignants et vous achèverez la tâche entamée avec zèle avant vous.

Quand, enfin, il n’y aura plus de profs, quand plus aucun jeune ne voudra s’engager dans le métier et que tous les anciens l’auront quitté, la Communauté française sera sauvée, Madame la Ministre ! Plus de salaires à verser, plus d’argent à dépenser pour les bâtiments qui tombent en ruine et où nous devons enseigner aux enfants à aimer le beau et la citoyenneté responsable, plus de profs pour se plaindre de ne plus pouvoir mener leur mission à bien. La Communauté française deviendra le désert éducatif qu’elle mérite d’être et elle ne coûtera plus un centime aux pouvoirs publics. Les écoles privées, dont seuls les nantis pourront se payer les services, s’épanouiront et les pauvres apprendront l’alphabet en regardant les lettres en vermicelle de leur soupe !

Voulez-vous en arriver là, Madame Simonet ? Voulez-vous ajouter votre nom à ceux de sinistre mémoire de celles et ceux qui, avant vous, petit à petit, mais sûrement, ont déstructuré, voire détruit l’enseignement dans la partie francophone du pays, celles et ceux qui ont cassé du prof et qui, à force d’inconscience et de décrets débiles, ont fait fondre les enthousiasmes ?

J’enseigne depuis près de trente ans, Madame, et je suis heureux dans mes classes. Pourtant, au fil des ans et des réformes, je constate que mon métier devient de plus en plus difficile à exercer et que, bientôt, plus aucun jeune ne choisira de s’y engager. Que deviendra notre société sans école, Madame la Ministre ?

Je suis en colère. Vous faites croire au grand public que nous travaillons vingt à vingt-deux heures par semaine. Faisons un rapide calcul : 22 heures de présence devant nos classes + 22 heures (et c’est compter petit) pour préparer nos cours et les batteries d’exercices interactifs selon les nouveaux critères mis en place par le ministère + 20 heures pour corriger les interros (environ douze minutes par copie multipliées par une centaine d’élèves, et en français, douze minutes, ce n’est pas un luxe !). J’en arrive déjà à plus de soixante heures par semaine et, bien entendu, je ne compte pas la pédagogie différenciée à mettre en place au fil des jours, les surveillances à réaliser bénévolement, les bulletins, les conseils de classe, les réunions de parents, les élèves en difficulté à aider pendant les récrés ou sur le temps de midi, les concertations avec mes collègues… J’arrête là, Madame ! Je ne voudrais pas vous donner l’impression que je travaille plus que vous !

Cela pour un salaire qui fait sourire les gens qui, à diplôme égal, bossent dans le privé. Qui ont un véhicule de société, qui ont le temps de faire une pause-café, qui ne doivent pas gérer des groupes de jeunes parfois très difficiles, qui ne sont pas confrontés à des parents de plus en plus revendicateurs et irresponsables, qui ne doivent pas se transformer en psy, en infirmier, en policier… et qui ne sont pas sans cesse à la merci de nouvelles règles pondues par des chercheurs en chambre qui trouvent des solutions miracles impraticables sur le terrain ! Sans compter les cohortes d’inspecteurs qui, en deux coups de cuillère à pot, décident de la valeur d’un prof qui se consacre, avec bonheur et avec honneur, à son métier parfois depuis plus de vingt ans ! J’en ai rencontré, et plus d’un, des gens qui ne croyaient plus en leur travail, qui ne croyaient même plus en eux, après la visite de vos évaluateurs !

« Merde », Madame la Ministre ! Le mot n’est guère choisi, surtout pour un professeur de français, mais il convient à la situation. En nous infantilisant, en nous ôtant la gestion de notre métier, en nous faisant passer pour des nuls, vos prédécesseurs et vous n’avez eu de cesse de détruire « le plus beau métier du monde » depuis les années 90.

Si cela ne concernait que nous, ça n’aurait peut-être qu’une moindre importance, mais ça concerne les enfants de la partie francophone de notre pays, ça concerne notre avenir à tous !

Peu vous importe, sans doute. Lorsque, faute d’écoles et de profs, votre fonction n’existera plus, on vous dénichera un autre portefeuille. Mais vos futurs électeurs, devenus analphabètes, comprendront-ils encore qu’ils doivent voter pour vous ?

Frank Andriat
Professeur à l’athénée communal Fernand Blum de Schaerbeek,
auteur de « Vocation Prof » (éd. Labor/Érasme)
24.09.09

mardi 29 septembre 2009

De Morichar à Belliard

Suite à des pressions et des menaces policières (trois visites de la police de Saint-Gilles dont une descente particulièrement intimidante), la centaine d'adultes et la cinquantaine d'enfants mal logés ont quitté l'Espace Morichar les 19, 20 et 21 septembre.

Contrairement à ce qui a parfois été écrit, les occupants ne sont pas des sans-papiers mais des mal-logés. Ils sont cependant nombreux à avoir un statut provisoire (carte orange : séjour provisoire), et les menaces policières de ce week-end ("Si vous ne sortez pas, on vous renvoie dans votre pays!") ont eu l'effet de terreur escompté.

Lundi 21 au matin l'huissier de justice s'est présentée avec le commissaire et une vingtaine de policiers de Saint-Gilles pour expulser les derniers occupants de l'immeuble au profit de l'Al Sabah trust Company, (siège social, Bank of American Building, 50thy Street, Panama). Après avoir ainsi servi les intérêts de spéculateurs et jeté à la rue des dizaines de familles qui avaient enfin trouvé un lieu de vie décent, les policiers ont remis l'immeuble aux vigiles.

Les familles mal logées se sont installées au 45 rue Belliard, dans un vaste immeuble du quartier européen présentant les même qualités d'hygiène, de sécurité et de confort que l'immeuble de la place Morichar. Nous n'avons pas eu de difficultés à trouver un nouvel endroit en trois jours, car nombreux sont les immeubles vides à Bruxelles, cette ville où trouver un loyer abordable ou un logement social est devenu mission impossible.

Vendredi 25 septembre, nous avons reçu du même cabinet d'huissiers un avis d'expulsion prenant cours ce samedi minuit pour l'immeuble de la rue Belliard. De prétendues raisons "urgentes" nécessiteraient de remettre à la rue 150 personnes. Cela nous a d'autant plus surpris que nous avions pu obtenir un rendez-vous avec le secrétaire d'Etat au logement Christos Doulkeridis et les représentants du propriétaire le mardi 29/09 à 14H30 dans l'espoir de signer une convention d'occupation provisoire...

Nous qui occupons la rue Belliard, nous invitons les sympathisants, les journalistes, les militants du droit au logement à ne pas attendre la prochaine opération policière pour nous rendre visite. Nous croyons que notre expérience mérite un moment d'attention. Nous venons du Maroc, de Slovaquie, d'Iran, d'Algérie, du Cameroun, du Niger, de Russie,... mais aussi de Belgique et nous construisons ensemble, contre la misère et la précarité, un espace de vie digne.

Merci de vous annoncer en téléphonant au 0477/24.57.97 ou au 0485/97/40.41
 
Les Occupants
28.09.09

lundi 28 septembre 2009

G20 : trois fois zéro et gesticulations en vain

Attac France analyse la déclaration finale du G20 de Pittsburgh. Pour la troisième fois en moins d’un an, le G20 vient d’administrer la preuve de son obstination à conforter le système financier mondial dans ses pires travers, ceux qui ont conduit à la plus grave crise depuis quatre-vingts ans.

Les décisions

Bonus : l’arbre qui cache la forêt
Le G20 braque les projecteurs sur les bonus des traders : les bonus pourront être fixés "en pourcentage du revenu net bancaire", lorsqu’une banque "ne dispose pas de fonds propres suffisants". Les traders seraient récompensés quand ils font faire des bénéfices à leur banque et seraient pénalisés en cas de perte. Qu’est-ce que ce système, sinon une légitimation des profits d’une finance « socialement inutile » par définition, selon les propres termes de M. Adair Turner, président de l’Autorité des services financiers du Royaume-Uni ?

G20 et FMI:
les nouveaux directoires de l’économie mondiale Le G20 annonce le retrait du G8 pour se promouvoir nouveau gouvernement de l’économie mondiale, laissant de côté une grande partie de l’humanité, celle qui est la plus pauvre. La modification minime des droits de vote au sein du Fonds monétaire international en faveur des pays émergents n’est pas en mesure de changer véritablement la réalité du pouvoir ni les fondements de ses politiques d’ajustement structurel.

OMC :
la libéralisation des marchés reste la seule solution Encore une fois, le G20 a défendu une conclusion du cycle de Doha à l’OMC dès l’année prochaine. "Nous maintiendrons l’ouverture et la liberté des marchés et réaffirmons les engagements pris à Washington et à Londres : nous nous abstiendrons d’élever des obstacles aux investissements ou aux échanges de biens et de services ou d’en imposer de nouveaux" et "nous ne recourrons pas au protectionnisme financier, notamment à des mesures qui restreindraient les flux de capitaux à l’échelle mondiale". L’idéologie néolibérale est intacte, malgré les dégâts qu’elle a entrainés depuis 30 ans.

Les absences

Les paradis fiscaux seront-ils démantelés ?
Non, ils sont blanchis, alors qu’à peine 5% d’entre eux ont signé des accords de coopération qui ne les engagent à pas grand-chose tant que les banques et les fonds spéculatifs ne seront pas empêchés d’y faire des opérations marquées par la fraude et l’évasion fiscales. Et la plupart des secrets des banquiers resteront bien enfouis.

Les marchés de gré à gré et les hedge funds seront-ils interdits, et les produits dérivés et la titrisation fortement encadrés ? Les banques de dépôts et les banques d’affaires seront-elles séparées ?
Non, tous les mécanismes financiers pratiquement incontrôlables sont maintenus et ils continueront à imposer des critères de rentabilité exorbitants et à générer des actifs financiers dont la valeur sera d’autant plus fictive qu’elle sera énorme.

Les transactions financières seront-elles taxées ?
Non, et pour donner le change, quelques voix gouvernementales parlent de la taxe Tobin, mais c’est aussitôt pour la rendre facultative, pour lui fixer un taux ridiculement bas, ou conditionner sa mise en œuvre à l’accord de l’ensemble des places boursières. De quoi rassurer les financiers.

Des mesures concrètes et efficaces seront-elles prises au niveau international contre le changement climatique ?
Non, l’appel des pays du G20 sur la question apparaît complètement creux, puisqu’aucune proposition concrète en terme de mesure et de financement n’est avancée. Leur intention affichée de "ne pas ménager leurs efforts pour conclure un accord à Copenhague" ne doit pas faire oublier que les positions actuelles des pays riches empêchent tout accord sérieux, à la hauteur des exigences écologiques.

Les conclusions d’Attac

Le G20, dans ses trois réunions de Washington (novembre 2008), Londres (avril 2009) et Pittsburgh, confirme que les gouvernements des pays les plus puissants considèrent que le système financier doit être remis en selle et non pas remis en cause : la foi en la capacité des marchés à s’autoréguler reste globalement intacte. Pourtant, la gravité de la crise, s’étendant de la finance à l’économie, au social et à l’écologie aurait dû servir de dernier avertissement.

Le sauvetage des banques et de l’ensemble du système financier sans aucune contrepartie pour la société, la relance de l’économie à coups de déficits publics sans imaginer un mode de développement écologique, et les atermoiements face au dérèglement climatique dont la régulation est confiée au marché créeront malheureusement les conditions d’une prochaine crise encore plus grave.

Les services publics, l’assurance maladie et les retraites continuent d’être privatisés dans les pays du G20, sous la pression des compagnies d’assurance et des fonds de pension, acteurs majeurs de la spéculation financière.

Les revenus du capital ne seront pas limités et ceux du travail attendront d’être revalorisés. Le G20 ne dit rien sur cette question d’autant plus cruciale que la montée extraordinaire des inégalités est l’une des principales raisons du caractère systémique de la crise.
L’association Attac réaffirme son opposition radicale à un système économique et financier prédateur et inégalitaire et son engagement en faveur :
- d’une socialisation du secteur bancaire et financier avec un contrôle citoyen ;
- d’une taxation internationale des transactions financières ;
- d’une limitation stricte des revenus financiers

Attac France
26.09.09

dimanche 27 septembre 2009

Après l'Irak, et l'Afghanistan... l'Iran, en point de mire?

"(...) Notre deux poids deux mesures dans le vaste monde - flagrant dès qu'on franchit la Méditerranée ou le Jourdain - doit beaucoup à notre premier fournisseur de bonne conscience. Les hommes d'affaires de l'Universel savaient aussi, et par ailleurs, vaquer à leurs affaires à eux. On a retenu la leçon. Seuls n'auront la bombe atomique que nous et nos amis; les résolutions du Conseil de Sécurité seront contraignantes quand elles visent nos ennemis du moment, et facultatives pour les autres; les Conventions de Genève (qui interdisent autant la punition collective que l'exhibition des prisonniers de guerre) sont opposables aux armées des barbares, non à nous, les Euro-Américains. (...)

J'avais moi-même oublié que nos grands émancipateurs ont bricolé, entre loges et salons, une arme de destruction massive, indétectable à l'œil nu: la civilisation. Il est des maîtres mots qui vont deux par deux comme les gendarmes et les bonnes soeurs: en l'occurence, le tandem civilisés-sauvages. L'homme civilisé est l'Européen; le sauvage est l'Africain et l'Américain. Le premier apporte la civilisation aux seconds. L'un est sujet; l'autre objet. Il le pacifie, l'affranchit, le protège, l'élève. En clair: il a pour mission de le rendre semblable à lui, qu'il aura remplie quand il l'aura dépersonnalisé. Même quand le généreux prend la défense du bon sauvage (contre le méchant conquistador ou le colon cruel), même quand il s'apitoie ou s'attendrit sur la triste situation faite à Atala, au Péruvien, aux Natchez, il va de soi que le salut de l'inférieur lui viendra de son alignement sur le modèle supérieur d'humanité. Toutes les variétés d'êtres humains passant par le même axe de perfectionnement, il ne peut y avoir qu'un seul port d'arrivée, un seul type de perfection au terme de ces rattrapages, plus ou moins décalés dans le temps: nous-mêmes. La volonté de libérer et le pouvoir de blanchir ne font qu'un. Sois clone et tais-toi.

Trois siècles plus tard, le mètre étalon de l'accomplissement n'est plus en Europe mais en Amérique du Nord; la civilisation a été rebaptisée la démocratie; et le sauvage, le totalitaire ou l'arriéré. Le démocrate achevé est l'Etatsunien; l'Arabe, l'Africain, le Sud-Américain méritants seront dits en voie de démocratisation (comme hier, de civilisation). Le couple indissoluble a repris du service, le passage du flambeau outre-Atlantique n'a pas altéré le jeu de rôles. Démocratiser, c'est coloniser, et coloniser, c'est rendre pareil à soi. Celui qui ne nous ressemble pas sera donc invité à se replacer dans la bonne direction, aidé en cela par le FMI, la Banque Mondiale, le Conseil de sécurité, et les éditoriaux du New York Times.

Et s'il persiste à ne pas comprendre où est son intérêt, et le fin mot de l'Histoire, il faudra ramener le récalcitrant à la Raison par la manière forte. Ce schéma implicite de légitimité n'est pas tributaire des âges barbares mais de notre âge exquis. (...) "

Régis Debray
Aveuglantes Lumières - Ed. Gallimard 2006 - extraits

samedi 26 septembre 2009

"Leurs" crimes et les "nôtres".

Le 24 septembre, l’International Herald Tribune publiait un article sur la situation de l’électricité en Irak (« Iraq’s economic development minefield », par Steven Lee Myers). Le journaliste montre le délabrement de l’équipement électrique dans ce pays, et les difficultés de sa remise à niveau. Une phrase et un oubli m’ont fait bondir. « Les industries étatiques qui dominent l’économie irakienne sont aussi pléthoriques et inefficaces qu’elles l’étaient sous Saddam Hussein, peut-être même plus. » Et comme solution, le texte, bien évidemment, défend la privatisation...

Il ne mentionne pourtant pas un fait majeur : que l’industrie électrique irakienne fonctionnait relativement bien avant 1990, et que les coupures d’électricité étaient alors rares. En réalité, sa destruction a été le résultat de la première guerre d’Irak (1991 — et, surtout, de la terrible politique de sanctions imposées par les Etats-Unis et leurs alliés dont la France (lire « Des sanctions qui tuent », par Denis Halliday, Le Monde diplomatique, janvier 1999). Cette politique a été à l’origine de la destruction de l’Etat irakien durant les années 1990 et explique son effondrement lors de l’invasion américaine de 2003. La plupart des responsables et commentateurs occidentaux le reconnaissent aujourd’hui et, pourtant, ce fait a disparu de nos mémoires. Nous nous souvenons, à juste titre, des crimes de Saddam Hussein ; pas des crimes commis par les alliés. Qui paiera pour l’invasion et la destruction de l’Irak depuis 2003 ? Nombre de gouvernements réclament des sanctions contre Kadhafi ou Ahmadinejad ; lesquels en ont fait de même pour le président Bush, qui porte la responsabilité de la destruction d’un pays et de dizaines de milliers de morts ?

Pour éviter les malentendus, je pense que Saddam Hussein et Kadhafi sont des dictateurs et, comme je l’ai écrit ici, qu’Ahmadinejad a truqué l’élection présidentielle de juin. Mais les crimes commis par un leader élu démocratiquement sont-ils moins terribles pour ses victimes ? Et la destruction de tout un pays est-il un crime moindre ?

Ce qui se passe à Gaza, par exemple. Indépendamment de ce que l’on peut penser du Hamas (et de ses atteintes aux droits individuels, à ceux des femmes ou à ceux des opposants), comment expliquer le silence sur l’étranglement de ce petit territoire, de l’étranglement de sa population, du fait que la rentrée des classes s’est faite dans des conditions épouvantables ? Pas un mot des gouvernements européens, pas un geste... Les médias s’intéressent à ce territoire quand il s’agit de savoir si le Hamas impose le foulard aux jeunes filles dans les écoles ! « Nous » avons oublié Gaza.

En Europe et aux Etats-Unis, nous tournons la page des massacres que nous commettons avec une grande facilité. On parle beaucoup de la repentance, mais on ne la voit nulle part. Les Etats-Unis ont voulu ramener le Vietnam à l’âge de pierre dans les années 1960 ; l’agent orange, un puissant défoliant, a été déversé massivement sur pays et continue, plus de trente ans après, à tuer et à mutiler des milliers de personnes, qui s’en soucie ? Les plaignants vietnamiens ont été déboutés devant des tribunaux américains (lire « Au Vietnam, l’“agent orange” tue encore », par Francis Gendreau, janvier 2006). En revanche, les victimes américaines d’attentats terroristes commis à l’étranger obtiennent des tribunaux américains d’importantes indemnisations.

Nelson Mandela est devenu une icône reçue dans le monde entier. A écouter les dirigeants américains ou français (et aussi les médias), on peut croire que les Etats-Unis ou la France ont été toujours contre le régime de l’apartheid. Il n’en est rien. Dans les années 1970, Henry Kissinger organisait la coopération avec Pretoria pour combattre le terrorisme (lire « Regards sud-africains sur la Palestine », août 2009) et le président Valery Giscard d’Estaing soutenait activement l’Afrique du Sud. Tout cela, bien sûr, au nom de la lutte contre le communisme. Nous avons ainsi longuement contribué à la survie d’un régime raciste (alors que l’Union soviétique et Cuba étaient du bon côté !). Si cela est oublié dans les capitales occidentales, cela ne l’est pas à Pretoria où, malgré les pressions, se maintient une solidarité tant avec les Palestiniens qu’avec les peuples d’Amérique latine.

De nombreux crimes sont commis dans les pays du Sud. De nombreuses atteintes aux droits de la personne aussi. Mais « nous » les voyons quand cela nous arrange. Nicolas Sarkozy dénonce le trucage de l’élection en Iran, mais il le fait depuis le... Gabon ! Enfin, il a fallu bien des efforts pour que la France reconnaisse que les élections en Afghanistan ont été truquées ; en revanche, elle reste silencieuse sur ce qui se passe en Tunisie.

Alain Gresh
25.09.09
Source: Les Blogs du Diplo

vendredi 25 septembre 2009

Quand un racisme rampant pousse ses tentacules au coeur de nos belles démocraties

Moi, Mustapha Kessous, journaliste au "Monde" et victime du racisme.

Brice Hortefeux a trop d'humour. Je le sais, il m'a fait une blague un jour. Jeudi 24 avril 2008. Le ministre de l'immigration et de l'identité nationale doit me recevoir dans son majestueux bureau. Un rendez-vous pour parler des grèves de sans-papiers dans des entreprises. Je ne l'avais jamais rencontré. Je patiente avec ma collègue Laetitia Van Eeckhout dans cet hôtel particulier de la République. Brice Hortefeux arrive, me tend la main, sourit et lâche : "Vous avez vos papiers ?"

Trois mois plus tard, lundi 7 juillet, jour de mes 29 ans. Je couvre le Tour de France. Je prépare un article sur ces gens qui peuplent le bord des routes. Sur le bitume mouillé près de Blain (Loire-Atlantique), je m'approche d'une famille surexcitée par le passage de la caravane, pour bavarder. "Je te parle pas, à toi", me jette un jeune homme, la vingtaine. A côté de moi, mon collègue Benoît Hopquin n'a aucun souci à discuter avec cette "France profonde". Il m'avouera plus tard que, lorsque nous nous sommes accrédités, une employée de l'organisation l'a appelé pour savoir si j'étais bien son... chauffeur.

Je pensais que ma "qualité" de journaliste au Monde allait enfin me préserver de mes principaux "défauts" : être un Arabe, avoir la peau trop basanée, être un musulman. Je croyais que ma carte de presse allait me protéger des "crochets" balancés par des gens obsédés par les origines et les apparences. Mais quels que soient le sujet, l'endroit, la population, les préjugés sont poisseux.

J'en parle souvent à mes collègues : ils peinent à me croire lorsque je leur décris cet "apartheid mental", lorsque je leur détaille les petites humiliations éprouvées quand je suis en reportage, ou dans la vie ordinaire. A quoi bon me présenter comme journaliste au Monde, on ne me croit pas. Certains n'hésitent pas à appeler le siège pour signaler qu'"un Mustapha se fait passer pour un journaliste du Monde !"

Ça fait bien longtemps que je ne prononce plus mon prénom lorsque je me présente au téléphone : c'est toujours "M. Kessous". Depuis 2001, depuis que je suis journaliste, à la rédaction de Lyon Capitale puis à celle du Monde, "M. Kessous", ça passe mieux : on n'imagine pas que le reporter est "rebeu". Le grand rabbin de Lyon, Richard Wertenschlag, m'avait avoué, en souriant : "Je croyais que vous étiez de notre communauté."

J'ai dû amputer une partie de mon identité, j'ai dû effacer ce prénom arabe de mes conversations. Dire Mustapha, c'est prendre le risque de voir votre interlocuteur refuser de vous parler. Je me dis parfois que je suis parano, que je me trompe. Mais ça s'est si souvent produit...

A mon arrivée au journal, en juillet 2004, je pars pour l'île de la Barthelasse, près d'Avignon, couvrir un fait divers. Un gamin a été assassiné à la hachette par un Marocain. Je me retrouve devant la maison où s'est déroulé le drame, je frappe à la porte, et le cousin, la cinquantaine, qui a tenté de réanimer l'enfant en sang, me regarde froidement en me lançant : "J'aime pas les Arabes." Finalement, il me reçoit chez lui.

On pensait que le meurtrier s'était enfui de l'hôpital psychiatrique de l'endroit : j'appelle la direction, j'ai en ligne la responsable : "Bonjour, je suis M. Kessous du journal Le Monde..." Elle me dit être contente de me recevoir. Une fois sur place, la secrétaire lui signale ma présence. Une femme avec des béquilles me passe devant, je lui ouvre la porte, elle me dévisage sans me dire bonjour ni merci. "Il est où le journaliste du Monde ?", lance-t-elle. Juste derrière vous, Madame : je me présente. J'ai alors cru que cette directrice allait s'évanouir. Toujours pas de bonjour. "Vous avez votre carte de presse ?, me demande-t-elle. Vous avez une carte d'identité ?" "La prochaine fois, Madame, demandez qu'on vous faxe l'état civil, on gagnera du temps", riposté-je. Je suis parti, évidemment énervé, forcément désarmé, avant de me faire arrêter plus loin par la police qui croyait avoir... trouvé le suspect.

Quand le journal me demande de couvrir la révolte des banlieues en 2005, un membre du club Averroès, censé promouvoir la diversité, accuse Le Monde d'embaucher des fixeurs, ces guides que les journalistes paient dans les zones de guerre. Je suis seulement l'alibi d'un titre "donneur de leçons". L'Arabe de service, comme je l'ai si souvent entendu dire. Sur la Toile, des sites d'extrême droite pestent contre "l'immonde" quotidien de référence qui a recruté un "bougnoule " pour parler des cités.

Et pourtant, s'ils savaient à quel point la banlieue m'était étrangère. J'ai grandi dans un vétuste appartement au coeur des beaux quartiers de Lyon. En 1977, débarquant d'Algérie, ma mère avait eu l'intuition qu'il fallait vivre au centre-ville et non pas à l'extérieur pour espérer s'en sortir : nous étions parmi les rares Maghrébins du quartier Ainay. Pour que la réussite soit de mon côté, j'ai demandé à être éduqué dans une école catholique : j'ai vécu l'enfer ! "Retourne dans ton pays", "T'es pas chez toi ici", étaient les phrases chéries de certains professeurs et élèves.

Le 21 décembre 2007, je termine une session de perfectionnement dans une école de journalisme. Lors de l'oral qui clôt cette formation, le jury, composé de professionnels, me pose de drôles de questions : "Etes-vous musulman ? Que pensez-vous de la nomination d'Harry Roselmack ? Si vous êtes au Monde, c'est parce qu'il leur fallait un Arabe ?"

A plusieurs reprises, arrivant pour suivre un procès pour le journal, je me suis vu demander : "Vous êtes le prévenu ?" par l'huissier ou le gendarme en faction devant la porte du tribunal.

Le quotidien du journaliste ressemble tant à celui du citoyen. Depuis plusieurs mois, je cherche un appartement. Ces jours derniers, je contacte un propriétaire et tombe sur une dame à la voix pétillante : "Je m'appelle Françoise et vous ?" "Je suis M. Kessous ", lui répondis-je en usant de mon esquive habituelle. "Et votre prénom ?", enchaîne-t-elle. Je crois qu'elle n'a pas dû faire attention à mon silence. Je n'ai pas osé le lui fournir. Je me suis dit que, si je le lui donnais, ça serait foutu, qu'elle me dirait que l'appartement avait déjà été pris. C'est arrivé si souvent. Je n'ai pas le choix. J'hésite, je bégaye : "Euhhhhh... Mus... Mustapha."

Au départ, je me rendais seul dans les agences immobilières. Et pour moi - comme par hasard - il n'y avait pas grand-chose de disponible. Quand des propriétaires me donnent un rendez-vous pour visiter leur appartement, quelle surprise en voyant "M. Kessous" ! Certains m'ont à peine fait visiter les lieux, arguant qu'ils étaient soudainement pressés. J'ai demandé de l'aide à une amie, une grande et belle blonde. Claire se présente comme ma compagne depuis cet été et fait les visites avec moi : nous racontons que nous allons prendre l'appartement à deux. Visiblement, ça rassure.
En tout cas plus que ces vigiles qui se sentent obligés de me suivre dès que je pose un pied dans une boutique ou que ce vendeur d'une grande marque qui ne m'a pas ouvert la porte du magasin. A Marseille, avec deux amis (un Blanc et un Arabe) - producteurs du groupe de rap IAM -, un employé d'un restaurant a refusé de nous servir...

La nuit, l'exclusion est encore plus humiliante et enrageante, surtout quand ce sont des Noirs et des Arabes qui vous refoulent à l'entrée d'une boîte ou d'un bar. Il y a quatre mois, j'ai voulu amener ma soeur fêter ses 40 ans dans un lieu parisien "tendance". Le videur nous a interdit l'entrée : "Je te connais pas !" Il aurait pourtant pu se souvenir de ma tête : j'étais déjà venu plusieurs fois ces dernières semaines, mais avec Dida Diafat, un acteur - dont je faisais le portrait pour Le Monde - et son ami, le chanteur Pascal Obispo.

Fin 2003, je porte plainte contre une discothèque lyonnaise pour discrimination. Je me présente avec une amie, une "Française". Le portier nous assène le rituel "Désolé, y a trop de monde." Deux minutes plus tard, un groupe de quinze personnes - que des Blancs - entre. Je veux des explications. "Dégage !", m'expédie le videur. La plainte sera classée sans suite. J'appellerai Xavier Richaud, le procureur de la République de Lyon, qui me racontera qu'il n'y avait pas assez d'"éléments suffisants".

Que dire des taxis qui après minuit passent sans s'arrêter ? Que dire de la police ? Combien de fois m'a-t-elle contrôlé - y compris avec ma mère, qui a plus de 60 ans -, plaqué contre le capot de la voiture en plein centre-ville, fouillé jusque dans les chaussettes, ceinturé lors d'une vente aux enchères, menotté à une manifestation ? Je ne compte plus les fois où des agents ont exigé mes papiers, mais pas ceux de la fille qui m'accompagnait : elle était blonde.

En 2004, une nuit à Lyon avec une amie, deux policiers nous croisent : "T'as vu le cul qu'elle a !", lance l'un d'eux. "C'est quoi votre problème ?" rétorqué-je. Un des agents sort sa matraque et me dit en la caressant : "Il veut quoi le garçon ?" Le lendemain, j'en ai parlé avec Yves Guillot, le préfet délégué à la police : il m'a demandé si j'avais noté la plaque de leur voiture. Non...

En 2007, la brigade anticriminalité, la BAC, m'arrête sur les quais du Rhône à Lyon : j'étais sur un Vélo'v. On me demande si j'ai le ticket, si je ne l'ai pas volé. L'autre jour, je me gare en scooter sur le trottoir devant Le Monde. Je vois débouler une voiture, phares allumés : des policiers, mains sur leurs armes, m'arrêtent. Je leur dis que je travaille là. Troublés, ils me demandent ma carte de presse, mais pas mon permis.

Des histoires comme celles-là, j'en aurais tant d'autres à raconter. On dit de moi que je suis d'origine étrangère, un beur, une racaille, un islamiste, un délinquant, un sauvageon, un "beurgeois", un enfant issu de l'immigration... Mais jamais un Français, Français tout court.

Mustapha Kessous
23.09.09
Source: Le Monde

jeudi 24 septembre 2009

Les conclusions sur l’islam sont-elles déjà écrites ?

Les politiques veulent débattre de l'islam, mais les musulmans en sont pratiquement absents. Va-t-on penser "neuf", régler des comptes ou imposer des vues déjà arrêtées ?

Les "Assises de l’interculturalité" prévues par l’accord intergouvernemental seront une occasion importante pour montrer la capacité de la société et de la classe politique belge de faire face à des enjeux complexes et ce par une méthode "à la belge", celle d’un pragmatisme cadré et négocié. Ce qui est différent du mode français, qui se fonde sur la forte identité républicaine, sur l’autorité de l’Etat et sur sa puissance d’injonction. Et qui est différent du mode britannique qui développe un pragmatisme trop confiant dans la force assimilatrice naturelle de la British way of life.

Pour que ces "Assises" aboutissent, il faudra quelques conditions.
1. La nécessité de sortir des euphémismes et des non-dits. Les "Assises de l’interculturalité" ont été lancées parce que les responsables politiques veulent parler de l’islam, cette religion dont l’implantation relativement récente soulève des enjeux nouveaux et problématiques dans la gestion de la vie commune. Autant le dire: ce qui permettrait de mettre en place un dispositif plus clair que celui envisagé, très classique mais peut-être, en l’occurrence, inadapté.
2. Se donner les moyens intellectuels de s’informer à fond : la technique des auditions prévues (qui ne sont pas publiques) n’aidera pas beaucoup tout comme l’appel à des pseudo-enquêtes ou à la sommaire Commission française dite Stasi.
3. Avoir le courage de penser neuf à tout point de vue. Il ne suffit pas de penser dans le cadrage intellectuel d’il y a vingt, quarante, cinquante ans si pas du XIXe siècle.
4. Ne pas vouloir régler les comptes entre réseaux scolaires - officiel et catholique - à travers le débat sur le foulard. Le fait qu’on envisage son interdiction éventuelle dans le réseau officiel est un bon moyen pour celui-ci de renvoyer la patate bouillante au réseau catholique, car des élèves en encore plus grand nombre pourraient y trouver refuge. Le débat sur le foulard concerne l’ensemble de la société et aurait avantage à être posé comme tel.
5. Il faudrait un débat entre les parties en présence pour sortir de controverses quelque peu autistes. Et là, le dispositif prévu pourrait faillir. Les musulmans en sont pratiquement absents; ils ne sont pas co-sujets de débat, mais objet de celui-ci.
Dans ce débat, il sera indispensable que les parties en présence argumentent et ne se satisfassent pas d’avancer des évidences. Il faudra aussi qu’elles laissent les soupçons systématiques et réciproques au vestiaire. Et qu’elles acceptent d’écouter les arguments d’en face.

Prenons la controverse sur le foulard.
Celles et ceux qui affirment que le port du foulard par des jeunes filles musulmanes est "nécessairement et en général" un signe de domination devraient préciser les faits sur lesquels ils se fondent pour une telle affirmation. Ils devront préciser si cette domination s’exerce plus qu’à l’égard de femmes, musulmanes ou non, qui n’ont pas de foulard. Et ils devraient préciser en quoi le port d’un foulard qui singularise un habillement féminin, est-il différent de talons aiguilles, d’un décolleté ou de régimes amaigrissants. Affirmer éventuellement que la différence provient du fait que c’est un signe religieux, ne suffira probablement pas pour convaincre qu’il s’agit d’autre chose que d’une position antireligieuse de principe. Ils devraient préciser aussi leur catégorisation générale, des "femmes au foulard", et pourquoi ils mettent toutes ces femmes dans le même sac; d’autant plus que, souvent, des filles qui portent le foulard accompagnent leur identité religieuse par un grand volontarisme dans les études.

Les musulmanes et musulmans, de leur côté, qui défendent le port du foulard devront expliquer aussi pas mal de choses. Pourquoi l’exigence de la pudeur enseignée par le Prophète comme règle de conduite pour les hommes et pour les femmes devient une crispation autour des règles vestimentaires féminines strictes ? Quelles règles interprétatives sous-tendent la lecture du texte coranique et des hadiths ? Qui sont les porteurs des interprétations multiples ? Quelles visions des rapports de genre sous-tendent ces positions ? Pour répondre à ces questions de manière convaincante, il ne suffira pas de répéter mécaniquement et de manière non critique les arguments de prédicateurs et de vrais ou présumés cheikhs, entre autre pour justifier non seulement le port d’un foulard, mais également du niqab qui couvre l’entièreté du visage. Il ne suffira pas non plus d’utiliser les arguments qui se bornent à dire que ce foulard est expression de la subjectivité et de l’identité personnelle. Car ce foulard est aussi un symbole et souvent un étendard. Il faudra enfin répondre à la question de savoir si, en amont, il n’y a pas une réédition de la réponse à l’angoisse de perte de suprématie patriarcale d’hommes, vieux ou jeunes, par le biais d’une obligation religieuse.

A travers ce débat, les uns et les autres devront mieux cerner les raisons (anciennes et surtout nouvelles) pour lesquelles dans des instances publiques d’une démocratie pluraliste, on en est arrivé dans la majorité des pays européens à la conclusion que, peut-être, les convictions politiques et celles intimes, religieuses ou athées, auraient avantage à être modérées. Enlever les foulards, tout comme les croix, les kippas ou les autocollants du Flambeau. Mais que propose l’école à la place ?

Mais il y aurait une autre question : faut-il débattre uniquement des signes convictionnels (à la manière du XIXe siècle) ou bien de tous les signes, et notamment ceux des marques de vêtements, expression de la lourde idéologie consumériste ou hédoniste - quasi religion de notre temps - dans laquelle les jeunes baignent jusqu’au cou ? Elle est source de frustrations, de rivalités et parfois cause de délinquance. Peut-être que des jeunes femmes préfèrent se distinguer par un habit religieux, plutôt que défier l’impossible concurrence des marques tandis que des jeunes hommes, eux, se replieront plutôt dans leur ghetto ethnique de mâles crâneurs.

L’interculturalité ne devrait-elle donc pas aussi porter sur les cultures contemporaines hégémoniques que l’école contribue à véhiculer ?
Pour répondre à fond à ces questions, parmi bien d’autres, les "Assises" devront éviter de pratiquer la langue de bois, se soucier d’analyser et se documenter, accepter d’écouter sans se prévaloir de solution toutes faites (ce qui n’est pas le cas en entendant des membres du comité de pilotage aux opinions déjà toutes tranchées) ni rechercher à la va-vite des solutions.
Car le plus grand défi de ces "Assises" est plus dans la recherche de la bonne méthode que dans l’acquisition de résultats et conclusions. Méthode qu’il sera d’autant plus important d’expérimenter que, certainement, ces "Assises" ne trouveront pas, dans l’année qu’elles ont devant elles et par un coup de baguette magique, les solutions à toutes les questions. Loin de là. Beaucoup de questions resteront ouvertes, incertaines. Le débat autour de la construction de l’islam européen durera encore des longues années. Mais il faut qu’il y ait débat.

Felice Dassetto
23.09.09

mercredi 23 septembre 2009

José Manuel Barroso est-il trop terne pour qu'on s'y attarde ?

C’est une première. Un président à la Commission européenne est réélu pour un second mandat. José Manuel Barroso vient d’accomplir cet exploit. Un exploit à son image, un exploit sans grand éclat.

D’ailleurs notre réputé éditorialiste du Devoir, Monsieur Serge Truffaut titre en ce samedi 19 septembre 2009 : « Réélection de Barroso - Terne président » [1]

Un Barroso sans éclat, un Barroso terne, un Barroso "caméléon" !

Je me suis dit que Monsieur Barroso valait tout de même un peu mieux et qu’il méritait qu’on s’attarde un brin à sa biographie. Qui est donc ce président ?

José Manuel Barroso est un personnage discret qui sait bien manœuvrer. Qui donc le connaît ? En tout cas, ici, en Amérique, peu de gens. Monsieur Truffaut dans son éditorial dit : « Les poids lourds de l’Union européenne (UE) — Allemagne, France et Royaume-Uni — peuvent dormir tranquilles : leur candidat à la présidence de la Commission européenne (CE), José Manuel Barroso, a été élu pour une deuxième fois consécutive. »

Il faut aussi dire que José Manuel Barroso est aussi « LE » candidat pour le groupe Bilderberg. La direction idéologique de ce terne président correspond exactement aux visions à long terme de ce groupe « d’élite économique ».

Ce politicien à la fois puissant et réservé est considéré par plusieurs comme étant un "caméléon". Il se confond dans la couleur du tapis, on ne le remarque pas beaucoup, mais il agit efficacement pour imprimer le mouvement de droite qu’il faut à la politique européenne.

Président de la Commission européenne depuis 2004, José Manuel Barroso — José Manuel Durão Barroso pour l’état civil (Durão désigne le nom de sa mère) – n’est pas vieux, il est né le 23 mars 1956 à Lisbonne (Portugal).

Sa carrière politique, si l’on peut dire, commence en 1974, pendant la Révolution portugaise des Oeillets qui entraîna la chute de la dictature initiée par Antonio Salazar, mort en 1970 et continué par Marcello Caetano marionnette politique de la PIDE (Police Internationale et de Défense de l’État, la police politique de la dictature portugaise). [2]

Barroso en 1974 se proclame "maoïste" et il prend la tête du mouvement des étudiants maoïstes portugais, le MRPP (Mouvement pour la Réorganisation du Parti du Prolétariat). Ce mouvement s’opposera ensuite, bizarrement, à l’accession au pouvoir du Parti communiste portugais. Certains ayant peut-être l’imagination trop fertile soupçonnent ce mouvement "maoïste" ( !) d’avoir été financé et manipulé par la CIA. Le monde de la CIA, est un monde de service secret qui nous dépasse tous. Il se pourrait bien que dans le secret, de petites "subventions" sous la table aient été acceptées pour "aider" le mouvement.

En tout cas, le MRPP a mis les bâtons dans les roues du parti communiste au Portugal et celui-ci n’a pas pu prendre le pouvoir. À cette époque, la CIA était très active pour empêcher tout ce qui pouvait être à gauche (pensons à Allende).

Un peu plus tard, Barroso quitte « l’extrême » gauche pour appuyer le socialiste Mario Soares. Sa progression vers la droite s’accentue et il se rend au centre droit en adhérant au mal nommé Parti Social Démocrate (PSD). Après des études universitaires en Suisse (en science politique), il devient chargé de cours, professeur et juriste. En 1985 il rentre au Portugal où est élu député et occupe différent ministère sous le gouvernement conduit par Anibal Cavaco Silva (il conservera ce mandat de député jusqu’en 2002, remportant six élections consécutives)

En 1999 il accède à la présidence du PSD.

Tout doucement, sans éclat, il devient clairement à droite, occidentaliste, chrétien sioniste et atlantiste.

Il adhère totalement aux politiques des néo-conservateurs américains dont il soutient toutes les dérives sur la scène internationale.

En mars 2003, il organise pour eux le Sommet des Açores qui rassemble George W. Bush, Tony Blair et José Maria Aznar afin de décider du déclenchement de la guerre en Irak contre l’avis de l’ONU.

Il est Premier ministre du Portugal de 2002 à 2004 dirigeant un gouvernement de coalition avec le Parti populaire (droite).

Il met à la disposition des services secrets US les aéroports et l’espace aérien portugais afin de faciliter le transfert secret en toute illégalité de quelque 700 prisonniers arabo-musulmans vers Guantanamo.

Polyglotte — il parle français, anglais, espagnol, portugais et un peu allemand — Le 22 juillet 2004, il est désigné pour succéder à Romano Prodi à la présidence de la Commission européenne. Il affronte le Belge Guy Verhofstadt, un fédéraliste convaincu et opposant de la première heure à la guerre en Irak (vous savez la vieille Europe qui s’opposait). Barroso est alors fermement soutenu par Tony Blair et par les dirigeants européens les plus conservateurs. Il recueille 413 voix sur 711 lors d’un vote spécial du Conseil européen et entame son premier mandat de cinq ans en novembre 2004.

Il engage l’Europe dans une politique économique ultralibérale et prône la libéralisation totale du grand marché mondial. Un vrai de vrai "mondialisateur" totalement au service du libre-marché, c’est-à-dire de la prédation économique totale.

Il favorise l’introduction des OGM en Europe malgré l’opposition citoyenne, prend régulièrement position en faveur du régime d’apartheid israélien, soutient activement le très contesté Traité modifié de Nicolas Sarkozy (dit Traité de Lisbonne)

On parle aussi ces temps-ci de l’importance de plus en plus marquée de l’OTAN en Europe. Barroso "milite" pour le projet d’une défense militaire européenne totalement intégrée à l’OTAN.

C’est un habile patineur, il tient des discours souvent incompréhensibles et contradictoires et ne cesse d’effectuer des revirements sur presque tous les dossiers sensibles. Cette caractéristique lui vaut donc le surnom de "caméléon".

C’est surtout grâce à ses excellents talents de patineur et sa grande faculté d’être caméléon qu’il a pu rallier cette majorité à sa cause (de Sarkozy son grand ami à Zapatero le socialiste). Il a donc été réélu le 16 septembre 2009 pour un second mandat de cinq ans à la présidence de la Commission européenne. Ses amis de droite aidés de quelques conquêtes lui donnent une confortable majorité de 382 voix sur 718. 219 eurodéputés (essentiellement Verts et Gauche radicale) votent contre lui, alors que 117 (pour la plupart membres du Parti Socialiste Européen) s’abstiennent, entraînant par le fait même sa réélection.

Le caméléon Barroso sait dire comme son interlocuteur afin de le séduire (voire de l’endormir) mais sans toutefois se laisser influencer par quiconque pouvant modifier la direction de ses politiques.

On pourrait croire que ses patrons et ou associés sont le groupe Bilderberg.

Serge Charbonneau
22.09.09 - Québec

Source: Le Grand Soir

Notes:
[1] http://www.ledevoir.com/2009/09/19/267722.html
[2] Les informations concernant la biographie de M. Barroso sont en grande partie extraites d’un biographie réalisée par Noël Blandin sur le site « La République des Lettres » http://www.republique-des-lettres.fr/10876-jose-barroso.php

Invitation à notre Assemblée Générale

Camarades, chères amies, chers amis,

nous vous informons que la prochaine Assemblée Générale du mouvement ÉGALITÉ aura lieu
ce vendredi 25 septembre 2009, de 19 à 22 heures,
et se tiendra au local de la COCAB, rue du Canal n°4, à 1000 Bruxelles.

A l'ordre du jour:

- recherche d'un local,
- création d'un site web,
- actualité et suivi des activités en cours,
(cours de néerlandais, marche pour l'enseignement, émeutes, voile, boycott dattes, affaire Luk et Ali Aarrass)
- projet Enseignement,
- projet Marche pour Gaza

Nous vous y attendons nombreux!

mardi 22 septembre 2009

La "No fly list", un nouvel instrument contre la liberté d'expression

Le 19 août 2009 , le jumbo d'Air France vol 438 qui effectuait le trajet Paris-Mexico sans escale s'est vu refuser de survoler le territoire des Etats-Unis. En conséquence il a dû changer d'itinéraire, piquer vers le Sud, contourner la Floride par les Caraïbes, ce qui a signifié une heure de vol supplémentaire.

Alors que nous volions au milieu de l'Atlantique, un membre de l'équipage est venu me voir pour me dire, au nom du capitaine, que ce changement de trajectoire, qui allait apparaitre sur les écrans, était dû à ma présence à bord. Après le décollage ils avaient envoyé la liste des passagers aux autorités américaines qui ont répondu que je figurais sur leur liste noire, avec interdiction de survoler les Etats-Unis. La même situation s'était présentée quelques mois auparavant, avec M. Hernando Calvo, un journaliste du journal Le Monde Diplomatique. A cette occasion l'avion avait dû même faire escale à la Martinique pour se réapprovisionner en kérosène.

Pour mon retour en Europe, Air France m'a imposé un autre itinéraire qui incluait une escale dans les Caraïbes.

Mes ennuis avec les autorités américaines ont commencé le 18 juillet 2004 - trois ans après le 11 septembre, sous l'administration Bush - lors d'un transit à Miami qui n'aurait dû durer qu'une heure. Comme collaborateur du groupe GUE/GVN du Parlement européen j'accompagnais alors une délégation parlementaire qui revenait du Venezuela et du Nicaragua. Au bureau de l'immigration à Miami, le douanier a trouvé suspect que mon passeport soit rempli de cachets de séjours en Afrique, en Amérique latine et en Asie. Il a dès lors ordonné ma détention, et bien que j'aie montré mon accréditation au Parlement européen, et que j'aie expliqué qu'il s'agissait de voyages réalisés dans le cadre de mon travail au Parlement européen (ACP, délégations AL,..., Forum Sociaux) il a décidé de me retenir. Durant les premières 5 heures de détention, divers policiers m'ont interrogé par intermittence, la plupart hispanophones. L'un d'eux m'a commenté qu'il était un ancien garde somoziste et a affirmé qu'il y en avait d'autres comme lui dans son service. Ils m'ont posé diverses questions sur mes voyages du type: "Etes-vous allés à Cuba ? Avez-vous parlé personnellement avec Fidel Castro ? Vous êtes allés au Venezuela, avez vous parlé personnellement avec Hugo Chavez ?..." Ensuite ils ont consulté internet et m'ont posé des questions sur des articles que j'ai écrit dans diverses revues. Après cela ils ont pris les empreintes de mes dix doigts, photographiés les iris, etc..., et ont inscrit un code sur la couverture de mon passeport, partie intérieure. Ils m'ont déclaré que si je souhaitais revenir aux Etats-Unis, je devais impérativement demander un visa.

Ensuite ils m'ont emmené dans une cellule dans le sous-sol de l'aéroport. 24 heures plus tard, ils m'ont emmené à l'avion Iberia en confiant mon passeport au pilote, pour qu'il le donne à la police espagnole. A Madrid j'ai été détenu par la police espagnole, et immédiatement relâché.

En Juillet 2007, je devais me rendre en Equateur, toujours pour mon travail au Parlement, pour conseiller les députés de mon groupe assistant à la réunion officielle d'Eurolat qui se tenait à Quito et qui était organisée par le Parlement européen et les parlements régionaux d'Amérique latine. Y aller via les Etats-Unis coûtait moins cher et me permettait de savoir si les Etats-Unis allaient me délivrer un visa. J'ai demandé ce visa via le service du protocole du Parlement européen. L'ambassade a fait savoir aux fonctionnaires du protocole étonnés, qu'il fallait que je vienne moi-même pour demander le visa. C'est la consule en personne qui s'est occupée de moi. Le 29 Juin 2007 elle m'a remis un formulaire libellé à mon nom sur lequel il est indiqué que mon visa de transit était refusé avec comme motif coché: "section 212(a)(3)(B): terrorist activities". J'ai demandé si on pouvait savoir de quelles activités terroristes il s'agissait, elle m'a dit que non. J'ai demandé s'il y avait un recours possible, elle m'a dit que non. J'ai demandé s'il y avait une limite de temps, et elle m'a également répondu par la négative. J'en ai informé ma hiérarchie de cette situation absurde, et j'ai voyagé à Quito par un vol direct.

Le 19 août 2009 c'est à Mexico que je devais me rendre à Mexico avec une délégation du groupe GUE/NGL pour y assister à la réunion du Forum de Sao Paolo. En achetant un billet Air-France Paris-Mexico, j'étais loin de me douter que ce vol serait dévié suite à ma présence à bord et que je figurais sur une liste des personnes ne pouvant même pas survoler les Etats-Unis à plus de 10.000 mètres...

Il s'agit là soit d'une erreur des autorités américaines, ou plus probablement d'un nouvel abus des mesures antiterroristes afin de réprimer la liberté d'expression, et plus généralement de frapper la gauche et le mouvement des droits de l'homme. Je travaille depuis 18 ans au Parlement européen pour le groupe GUE/NGL.

En Belgique, en Amérique latine, en Afrique, et même aux Etats-Unis, beaucoup de personnes connaissent bien mes activités comme défenseur des droits de l'homme et comme militant de gauche, utilisant les divers instruments politiques à disposition pour agir de façon pacifique et démocratique. Je suis membre de divers collectifs de solidarité et de défense de droits de l'homme, notamment sur la Colombie.

Il est normal que dans le cadre de mon travail et dans ma vie militante j'ai maintes fois contribué à donner la parole à des victimes de politiques des Etats-Unis ou de leurs transnationales et j'ai écrit quelques articles dans ce sens, ou d'autres, notamment dans Le Monde Diplomatique, appuyant les nouveaux gouvernements de gauche d'Amérique latine et leurs politiques en faveur de la justice sociale et l'intégration émancipatrice de leur continent. J'ai aussi participé à des documentaires sur l'invasion du Panama ou sur l'assassinat de syndicalistes ou leaders paysans en Colombie pour la télévision publique belge RTBF. J'ai participé à des manifestations contre la guerre en Irak, contre les politiques de la Monsanto, contre le renouvellement par les Pays-Bas, du bail d'une base militaire US à Aruba. Dans le cadre de mon travail au Parlement européen diverses auditions ont été organisées au cours desquelles des points de vue critiques sur les politiques des Etats-Unis ou de leurs transnationales américaines ont été exprimés, par exemple sur les lois Helms-Burton, sur le Plan Colombie, ou sur les abus de Coca-Cola en Inde et en Colombie, etc...). Mais mon attention principale a toujours porté la nécessité de changer l'orientation de la politique internationale de l'Union européenne elle-même.

Le fait que mon nom soit stigmatisé dans les médias et présenté sur une liste de personnes présumées violentes - quoique je n'aie commis aucun délit ni aucune action violente - constitue un handicap bien entendu pour développer des activités professionnelles et militantes, et arrange bien les gouvernements que nous critiquons pour les violations massives des droits de l'homme.

D'autres difficultés s'y ajoutent, notamment le fait de ne pas pouvoir voyager aux Etats-Unis, ni vers d'autres pays par des vols faisant escale ou même survolant un coin des Etats-Unis rend difficiles et dispendieux les voyages dans la région. J'ignore si ces mesures vont encore s'étendre et à quel rythme, dans leurs portée ( autres pays alliés des Etats-Unis, mesures économiques tels que blocage de cartes bancaires, etc...) ou dans leurs destinataires (famille, amis, autres militants, etc...)

Il faut s'interroger sur le fait que les autorités européennes aient négocié en 2007 avec les Etats-Unis un accord comportant des concessions purement unilatérales (comme le Panama en 1903...) qui ouvre toute grande la porte à de tels abus contre la liberté d'opinion et la liberté de circulation. Pourquoi de telles mesures sont-elles possibles contre des citoyens européens qui ont commis un "délit d'opinion", tandis que de véritables criminels tels que Posada-Carriles, qui se vante d'avoir fait exploser un avion civil en plein vol, ou les tortionnaires de la prison d'Abou Ghabi ou de Guantanamo, qui ne sont pas inquiétés aux Etats-unis, peuvent-ils voyager sans entraves en Europe ?

Il serait légitime d'attendre des autorités de la Belgique et de la France qu'elles réagissent et défendent dignement les droits d'expression et de circulation de leurs citoyens notamment en appliquant des mesures de réciprocité, face à de tels abus contre leurs nationaux.

Il serait légitime d'attendre du coordinateur de la lutte antiterroriste de l'UE qu'il pose des questions aux autorités américaines sur la l'efficacité de leur lutte contre le terrorisme et sur la raison pour laquelle des noms de personnes qui n'ont rien à voir avec le terrorisme y figurent.

Il serait bon de savoir aussi si cette politique du gouvernement Bush d'utilisation claire de la lutte contre le terrorisme à des fins de limitation des droits civils sera ou non poursuivie par l'administration du président Obama.

Les Etats-Unis sont franchement bien malades. Lorsque les autorités, -sous prétexte de lutte contre le terrorisme ou autre-, s'en prennent en réalité à la liberté d'expression et au travail politique pacifique et démocratique, au lieu d'améliorer la sécurité des citoyens ils renforcent et donnent des arguments à ceux qui prônent des solutions violentes.

Paul-Emile Dupret
17.09.09

RAPPEL > Conférence-débat :
La lutte contre le terrorisme et ses dérives - La criminalisation Made in USA de militants belges
ce mardi 22 septembre à 19 h au Garcia Lorca, rue des Foulons 47/49 - 1000 Bruxelles
(voir annonce ci-dessous dans le blog)

lundi 21 septembre 2009

Vote historique des syndicats britanniques en faveur du boycott d’Israël

Dans une décision historique, les syndicats britanniques ont voté à une écrasante majorité la décision de mettre en œuvre un mouvement de masse pour boycotter, désinvestir et sanctionner Israël jusqu’à l’obtention d’un accord négocié fondé sur la justice pour les Palestiniens.

Communiqué du 17 septembre 2009

"La motion a été votée lors du TUC (Trade Union Congress) au Congrès Annuel 2009 de Liverpool ce jeudi, par des syndicats représentants 6,5 millions de travailleurs anglais.

Hugh Lanning, président de la Campagne de Solidarité avec la Palestine, a déclaré : « Cette motion est le point culminant des motions passées dans les congrès syndicaux cette année, à la suite des violences lors de la guerre sauvage d’Isarël contre Gaza, et reflète la montée massive du soutien en faveur des droits des Palestiniens. Nous avons travaillé avec les TUC pour développer une campagne massive de boycott des produits israéliens, en particulier les produits agricoles qui sont produits dans les colonies israéliennes illégales, dans la Cisjordanie palestinienne ».

De plus, la motion engage le Conseil Général des TUC à faire pression sur le gouvernement britannique pour qu’il mette un terme aux ventes d’armes à Israël, et qu’il soutienne les mouvements pour la suspension des accords économiques entre l’Europe et Israël. Les syndicats ont aussi encouragé le désinvestissement des entreprises qui profitent des 42 ans d’occupation israélienne à Gaza et en Cisjordanie.

La motion a été présentée par l’Union des Compagnies de Pompiers. Les syndicats les plus importants de grande-Bretagne, dont Unite, le syndicat du secteur public, et Unisson, qui représente les travailleurs des services de santé, ont voté en faveur de la motion.

La motion a également condamné les déclarations de l’Histadrut, le syndicat israélien, qui soutient la guerre d’Israël contre Gaza qui a tué 1450 Palestiniens en trois semaines, et a appelé les TUC à revoir leurs relations avec l’Histadrut.

Les syndicats britanniques rejoignent ainsi ceux d’Afrique du Sud et d’Irlande dans leur vote pour qu’une campagne massive de boycott soit utilisée comme outil capable de ramener Israël dans la droite ligne du droit international, et l’obliger à respecter les résolutions de l’ONU qui encouragent justice et égalité pour le peuple palestinien."

Palestine Solidarity Campaign
17.09.2009
(Traduit Par Carole SANDREL pour CAPJPO-EuroPalestine)

dimanche 20 septembre 2009

Invitation: Assises sur l'islamophobie

Dans le cadre des Assises de l’Interculturalité initiées par le Gouvernement fédéral, le MRAX vous convie à une après-midi de réflexion:
samedi 26 septembre 2009 de 14h à 17h
salle Don Helder Camara: rue Plétinckx, 19 à 1000 Bruxelles.

Avec les contributions de :

Samy BEBAH, Président du Collectif Contre l’Islamophobie en France. "Du bon usage de l’islamophobie"
Henri GOLDMAN, Rédacteur en chef de la revue de débats "Politique". "La gauche, la droite et les musulmans"
Marc JACQUEMAIN, Sociologue et Professeur à l’Université de Liège (Département de socilogie des identités contemporaines) "La couleur de l’Universel"
Pierre TEVANIAN, Philosophie et co-animateur du Collectif "Les mots sont importants" - France "L’islamophobie : expression d’un communautarisme majoritaire ?"
Inés WOUTERS, Avocate au Barreau de Bruxelles, spécialisée en droit des minorités religieuses. "Comment le droit traite ou ne traite pas de l’islamophobie?"
Introduction et modération par Radouane BOUHLAL, Président du MRAX.
Conclusion par Joëlle MILQUET, Vice-Première Ministre de l’Emploi et de l’Egalité des chances, chargée de la Politique de Migration et d’Asile.

Entrée et buffet libres.
Renseignements : 02/209.62.50 - 0484/98.52.68

samedi 19 septembre 2009

Invitation



Luk Vervaet, enseignant en milieu carcéral, interdit d'exercice pour délit d'opinion...


Paul-Emile Dupret, conseiller au Parlement européen, interdit de survol des USA pour délit d'opinion...


La police de certaines communes de Bruxelles interdit la distribution de tracts exhortant la population à ne pas consommer de produits importés d'un pays pratiquant l'apartheid et reconnu coupable par les instances internationales de crimes de guerre...

L'Italie et son président tout puissant cadenasse de plus en plus les médias dont il s'assure le contrôle...

La France orchestre les déplacements de son président afin qu'aucune voix ne soit dissonante...


A l'heure où, la liberté d'expression semble constituer un délit, n'est-il pas urgent de dénoncer cette dérive qui menace gravement la santé même de nos démocraties ?

vendredi 18 septembre 2009

Islamophobie savante, islamophobie politique

Nous vivons les temps de l’islamophobie. Chaque jour apporte sa pierre à l’édification d’une machine de guerre d’autant plus efficace qu’elle ne relève d’aucun complot et qu’elle enrôle sous sa bannière des responsables de gauche et de droite, des intellectuels de gauche et de droite, des « savants » de gauche et de droite. Burqa, affaire Vincent Geisser – que j’ai eu tort de ne pas évoquer avant sur ce blog –, femmes afghanes, pratique du ramadan, etc, tout est bon, non pour critiquer l’islam (« Peut-on critiquer l’islam ? »), mais pour stigmatiser les musulmans et, surtout, créer une atmosphère de troisième guerre mondiale.

C’est en mars 2006 que Charlie-Hebdo publie « Le manifeste des douze : ensemble contre le nouveau totalitarisme », L’Express, 2 mars 2006, où l’on retrouve les incontournables Bernard-Henri Lévy, Caroline Fourest, Philippe Val, Antoine Sfeir:

« Après avoir vaincu le fascisme, le nazisme et le stalinisme, le monde fait face à une nouvelle menace globale de type totalitaire : l’islamisme. Nous, écrivains, journalistes, intellectuels, appelons à la résistance au totalitarisme religieux et à la promotion de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité pour tous. » Nous restons dans cette atmosphère malsaine.

La publication par Le Seuil du livre « Aristote au Mont Saint-Michel. Les racines grecques de l’Europe chrétienne, » de Sylvain Gouguenheim avait suscité, au début 2008, une puissante polémique. (« Un historien au service de l’islamophobie » 7 mai 2008). Sous la direction de Max Lejbowicz, L’islam médiéval en terres chrétiennes (Presses universitaires Septentrion, Villeneuve d’Ascq, 2009), sous-titré « Science et idéologie », avait constitué une première riposte des « savants ». Le livre publié chez Fayard sous la direction de Philippe Büttgen, Alain de Libera, Marwan Rashe et Irène Rosier-Catach, Les Grecs, les Arabes et nous. Enquête sur l’islamophobie savante, est une nouvelle charge contre les impostures.

Les coordinateurs écrivent dans leur préface :

« Aristote au Mont-Saint-Michel développe une vision du monde qui s’insère très précisément dans la philosophie de l’histoire sarkozyste à la rencontre de trois axes majeurs : (1) exaltation de la France toute chrétienne, celui du “long manteau de l’Eglise” jeté sur nos campagnes ; (2) revendication assumée de l’“oeuvre positive” de la colonisation – puisque la science est, par essence, européenne ; (3) volonté de “liquider” définitivement Mai 68. Et l’on se trouve confronté à ce paradoxe, typique de notre temps, où l’auteur le plus en phase avec la doxa des idéologues officiels – on songe à celui qui, aux premiers jours de la Restauration (26 juillet 2007), composa l’inoubliable discours de Dakar – est décrit comme un parangon d’indépendance et de courage par diverses crécelles médiatiques. (...)

Les Arabes sont des Arabes, dit l’islamophobie savante, de peur qu’eux aussi ne soient grecs, comme nous le soutiendrons. Cela ne se dit qu’à la troisième personne : “eux les Arabes”, ceux qu’on désigne de loin, des banlieues aux universités, sur tout le trajet de l’islamophobie savante. Qui aujourd’hui peut dire : “Nous les Arabes” sans s’attirer les pires soupçons ? Raison de plus, aujourd’hui, pour que nous le fassions. Les Grecs, les Arabes. Et nous ? Nous les Grecs, bien sûr. Nous les Arabes pas moins. Mais nous les Latins, aussi bien que nous les juifs, nous tous les absents de la nouvelle Restauration, nous tous les autres, nous qui n’entrons pas dans les “synthèses”, “hélléno-chrétiennes” ou celles qu’on voudra, nous les composites. »

N’allez surtout pas dire aux membres de la mission d’information sur la burqa que nous sommes composites. Ils en tomberaient de leur fauteuil, eux comme les invités soigneusement triés. Prenez le temps de lire les témoignages et les réactions des députés, ils reflètent, malheureusement, l’état d’une opinion désinformée. Le 9 septembre, la mission a auditionné Mme Sihem Habchi, présidente de l’association Ni putes ni soumises et Mme Élisabeth Badinter, philosophe.

Rappelons que l’association Ni putes ni soumises est largement financée par les pouvoirs publics et les pouvoirs locaux, toutes tendances confondues. Et elle reçoit des aides d’autant plus importantes qu’elle ne dispose d’aucune base militante et qu’elle est absente de ces banlieues dont elle prétend vouloir défendre les jeunes filles. Sa présence dans les médias lui donne une légitimité que son audience sur le terrain ne lui permet guère.

Qu’explique sa présidente ? que « l’inconscience politique a, au bout du bout, permis les pires des exactions contre les femmes. J’ai encore devant les yeux le portrait de Sohane, brûlée vive dans un local à poubelles pour avoir dit non. Je me rappelle de Samira Bellil, qui a été victime de nombreux viols collectifs et nous a quittés il y a cinq ans. Me reviennent également en mémoire Erim, Malika et tant d’autres qui ont été victimes de mariages forcés, Diaryatou Bah qui a été victime d’excision qui l’a contrainte à faire trois fausses couches, Myriam qui, pour avoir simplement effleuré le bras d’un garçon a décidé d’en finir avec l’oppression familiale et s’est défenestrée en juin dernier. Si certaines ne sont plus parmi nous, d’autres restent debout pour faire en sorte que leurs sœurs ne soient pas mortes pour rien ». Ainsi, la violence contre les femmes qui, en France tue une demi douzaine de personnes par mois, serait le fait des seuls musulmans ? Pourquoi ne dit-elle rien sur la violence faite, aussi, aux femmes française « de souche » ? Pourquoi ne dénonce-t-elle pas l’attitude des médias : quand un homme français de souche tue sa compagne, il s’agit d’un crime passionnel, quand il s’agit d’un musulman, il s’agit d’une violence religieuse ou ethnique, on ne sait pas très bien.

En fait, ce que son discours sous-entend, ou même affirme clairement, comme celui de Mme Badinter c’est que nous pouvons parler des souffrances des femmes et même nous réclamer du féminisme – terme qui fut longtemps proscrit, mal vu, y compris à gauche (et le reste quand il s’agit de dénoncer les féministes américaines) – à condition de parler des femmes musulmanes. Dénoncer leur sort nous permet de dire que « nous » ne sommes pas comme « eux », nous ne sommes pas des arabes ou des musulmans, nous sommes les descendants de la civilisation grecque.

Il y a un moment fortement comique dans cette déposition, quand Mme Habchi affirme, sans rire, que « le chemin le plus court pour l’Asemblée nationale n’est ni le voile ni la burqa ». Cette dame sait-elle que, dans cette assemblée, il n’y a pas 15% de femmes députées ? Le fait qu’elles ne portent pas de foulard ne semble pas leur ouvrir les portes du pouvoir. (Rappelons que, jusque dans les années 1960, il y a eu des députés prêtres qui venaient en tenue au parlement ; le dernier, à ma connaissance, fut le chanoine Kir, maire de Dijon ; la République était pourtant laïque, mais, il est vrai, qu’elle n’était pas menacée par l’islam).

Je ne reviendrai pas longuement sur les déclarations de Mme Badinter, mais un principe sous-tend son intervention : « ils », les musulmans, doivent se conformer aux lois du pays dans lequel ils s’installent. Le seul problème c’est qu’ils ne s’installent pas, « ils » sont là, ils sont français et "ils" vont rester et faire la France. A moins qu’on ne veuille les déchoir de la nationalité, comme le pouvoir de Vichy l’a fait avec les juifs. Tout le monde s’est réjouit que l’on ait refusé la nationalité française à une femme musulmane qui portait la burqa. Fallait-il, dans les années 1930, refuser la nationalité à des juifs loubavitch qui ne s’habillaient pas comme tout le monde et avaient de drôle de papillotes ?

Alain Gresh
17.09.09

Source: les blogs du Diplo

jeudi 17 septembre 2009

Il nous faudra tout reconstruire

Dans une inconscience quasi générale, gavés par les discours démagogiques de pantins que le peuple, dans son acceptation du jeu électoral pervers, a mis au pouvoir, ou par celles et ceux qui aspirent à y accéder, nous assistons, les yeux fermés, au saccage d’un siècle de résultat de luttes sociales et d’acquis sociaux. A l’image de la banquise soumise au dérèglement climatique, le socle, idéologique et pratique, des acquis sociaux fond d’années en années entraînant la destruction du lien social et l’accroissement des tensions sociales au débouché plus qu’aléatoire.

LA LIQUIDATION DE L’HÉRITAGE

Elle n’est pas le fait d’un « coup d’Etat » brutal, emprisonnant une partie de la population, une opposition déterminée, et jetant du jour au lendemain les plus défavorisés dans la pauvreté.

Non, elle s’est faite, et se fait, le plus « démocratiquement » du monde. Avec un subtil et anesthésiant concours du système électoral – assurant une légitimité - qui permet à une petite fraction de prendre, légalement, le pouvoir par un discours de pure démagogie – du style « avec moi tout est possible ». La naïveté, la bêtise, l’inconséquence et la couardise de la soi disante opposition/des oppositions, faisant le reste….

Toutes les avancées sociales du lendemain de la Libération sont en voie de liquidation : protection sociale, retraites, garanties de stabilité d’emploi, services publics, santé,….

Le choix de cette liquidation à grande échelle est de nature purement idéologique et politique. En effet, rien ne permet aux liquidateurs de promettre sérieusement une amélioration générale du niveau de vie de la population,… au contraire la pauvreté gagne partout et les inégalités s’accroissent.

Bien sûr, les « experts » aux services des politiciens nous expliquent doctement que : « le marché c’est l’avenir », « le marché c’est la modernité », « la concurrence c’est le progrès et la garantie de meilleurs prix », « la privatisation c’est la liberté »,… et autres sophismes ridicules.

Les faits, partout dans le monde parlent d’eux-mêmes et montrent sans ambiguïté que tous ces discours sont des contre-vérités. Pourtant, le poids de l’idéologie libérale – de droite comme de gauche – arrive efficacement à berner le plus grand nombre,… aidé en cela par un système politique « républicainement sacralisé », qui ficelle tout véritable débat, évitant l’hypothèse de l’alternative au profit d’une alternance conservatrice (on a vu où nous a mené la Gauche).

L’aspect économique de cette liquidation est certes spectaculaire – destruction des grands monopoles publics, multiplication des officines commerciales et purement mercantiles, explosion de la spéculation dans tous les domaines, et pas seulement financier, assèchement des aides sociales au profit des soutiens aux financiers,…

Le moins spectaculaire – du moins pour le moment – mais assurément le plus dramatique, quoique lié au précédent, sont les conséquences sociales.

Derrière la marchandisation de la santé, c’est la disparition du droits aux soins pour tous – la qualité pour les riches, le minimum pour les pauvres.

Derrière la liquidation du système des retraites par répartition, c’est l’abolition de la solidarité inter générationnelle. C’est l’individualisation des retraites dans un contexte – la capitalisation de l’épargne salariale – qui crée une précarité très grave pour celles et ceux qui placent leur épargne dans les circuits financiers – voir les crises financières. Sans parler de celles et ceux qui ne peuvent même pas épargner.

Derrière la destruction des services publics, ce sont les aléas liés à la concurrence, à la surenchère mercantile, à la sélection des secteurs d’activité en fonction de leur solvabilité – voir l’énergie électrique, le gaz, le téléphone, le courrier,…

Derrière la dérèglementation du marché de la force de travail, c’est la précarisation généralisée de l’emploi avec toutes ses conséquences sur la vie sociale et individuelle. C’est la porte ouverte à l’asservissement général aux lois du Capital et à la dictature de la rentabilité.

Enfin, l’abandon de la règlementation de la vie sociale qui, dans le fonctionnement d’un système marchand prédateur pouvait, du moins dans une certaine mesure, en limiter les excès, ouvre la voir à un véritable déchirement du tissu social, au repli communautaire vécu comme une planche de salut, aux conflits sociaux, à la violence.

Sans parler des conséquences catastrophiques - et qui se font déjà sentir – sur le plan de la destruction de l’environnement.

QUEL HERITAGE LAISSONS NOUS ?

Se pose désormais une problème moral pour celles et ceux qui refusent l’attitude de « Après moi le déluge ! »

Quel héritage social laissons nous aux générations nouvelles ?

On peut dès à présent tracer les grandes lignes du désastre social qui s’annonce. Les tendances lourdes de la société que nous léguons à nos successeurs se développent aujourd’hui, inexorablement, sous nos yeux et dans une indifférence/inconscience quasi générale. : montée de l’individualisme, de la précarité, du communautarisme, de l’exclusion, de la violence.

L’individualisme : par un contre-sens pervers, la classe dominante a fait de la Liberté, un instrument de domination politique et de division de celles et ceux qu’elle soumet. Faisant de la liberté individuelle une arme contre la solidarité qui pouvait menacer sa domination. Le chacun pour soi, garantit la domination sur tous.

La précarité : elle est, d’une certaine manière un des dégâts collatéraux de l’individualisme. Dans une société, l’isolement de l’individu le rend vulnérable. Or, les lois du marché, celles du capital, la dérèglementation, garantie du développement illimité du profit, utilisent, instrumentalisent les individus en fonction de leur propre logique, de manière impersonnelle et asociale créant ainsi une précarité des existences et des statuts sociaux.

Le communautarisme : il est la conséquence de la faillite du « modèle républicain » sous les coups de buttoir des lois du marché d’un capitalisme mondialisé,… provoquant isolement social et précarisation. Le communautarisme apparaît comme un réflexe logique et humain à l’éclatement des valeurs qui fondaient la République. L’Etat, qui était le garant de ces valeurs, faisant définitivement le choix des intérêts du Capital mondialisé, est bien évidemment incapable de s’opposer à cette dérive, sinon par l’interdit et la répression.

L’exclusion : stade final de la précarisation, pur produit des relations marchandes qui font que les individus ne sont plus des sujets « socialement citoyens » mais de simples instruments au service de l’appareil économique – voir la dégradation des statuts juridiques des salariés. L’Homme n’est pas une marchandise, mais sa force de travail oui.

Vision pessimiste diront certains,… peut-être,… encore que tout un chacun est à même de se rendre compte – s’il fait un minimum d’effort – de la dégradation généralisée des relations sociales, sans parler de la dimension écologique.

Il est évident que la situation devient peu à peu socialement insupportable et ce ne sont pas les artifices politiques mis en place par le système qui, à terme, peuvent permettre son dépassement.

Une société ne peut pas subsister sans une solidarité – même si celle-ci s’exprime dans un cadre conflictuel – Or, aujourd’hui, la société marchande, dans sa phase de libéralisme, obnubilée par la fausse rationalité des mécanismes de marché, fait fi de toute solidarité et nie, de fait, sinon clairement de droit, la dimension sociale de l’existence humaine.

On peut faire l’hypothèse que le choix politique a été fait, consciemment de la part des gestionnaires du capital et inconsciemment de la part du peuple, de l’abandon de cette solidarité. La « rationalité » du marché, propice, du moins dans une certaine mesure, aux intérêts du Capital et qui a séduit le peuple, nous conduit au chaos et à la violence.

C’est par la mise en place concrète, et non dans des discours/programmes politiciens, de nouvelles solidarités, de nouveaux rapports sociaux, de nouvelles pratiques que nous pourrons reconquérir et améliorer tout ce qui est aujourd’hui mis à bas pour le bénéfice de quelques uns.

Cette reconstruction, sur des bases nouvelles, est bien sûr hors de portée des gestionnaires du capital et de leurs serviteurs de droite comme de gauche.

Patrick Mignard
13.09.09

Source: Le Grand Soir

mercredi 16 septembre 2009

Dexia et les nouvelles colonies israéliennes: nouvelles révélations.

L'organisation « WhoProfits » et la plate-forme "Palestine Occupée - Dexia Impliquée" ont découvert de nouveaux documents dérangeants. Dexia Israel Public Finance a signé, en juin 2009, un contrat basé sur un appel d'offre comprenant cinq colonies.

La campagne "Palestine Occupée - Dexia Impliquée" a débuté en novembre 2008. Elle rassemble des dizaines d'associations, des centrales syndicales, des mouvements, et vise une certaine politique du groupe Dexia. Via sa filiale israélienne - Dexia Israel Public Finance - le holding franco-belge accorde des crédits à des colonies israéliennes en territoire palestinien. Plus d'infos sur cette campagne via cet article

Cette campagne n'est pas sans effet. Lors de l'Assemblée Générale du Groupe Dexia qui s'est tenue le 13 mai 2009, le président du Conseil d'Administration de Dexia, Jean-Luc Dehaene, répondait aux représentants de la campagne "Palestine Occupé - Dexia Impliquée". L'ancien Premier Ministre belge déclarait « depuis septembre 2008, nous [Dexia] n'avons pas accordé de nouveaux crédits [aux colonies] et nous n'avons pas l'intention de le faire.» Pour toute une série de raisons évidentes expliquées dans cet article, la déclaration n'était pas satisfaisante. L'ancien Premier Ministre belge s'était néanmoins engagé par cette promesse.

Il semble que cet engagement n'ait pas tenu longtemps. L'organisation « Who Profits » (qui traque les entreprises générant leurs profits en exploitant d'une manière ou d'une autre l'occupation israélienne des territoires palestiniens) a mis à jour des éléments indiquant qu'un nouvel accord, basé sur un appel d'offre incluant des colonies israéliennes, a été conclu par Dexia Israel après l'Assemblée Générale du 13 mai 2009 et les déclarations mentionnées ci-dessus.

Que nous apprennent ces nouveaux documents?

Ils nous révèlent qu'à la suite de difficultés financières rencontrées par certaines municipalités israéliennes, le Ministère des Finances de l'Etat hébreu a mis sur pied un plan d'assainissement. Ce plan inclut, entre autres, une garantie d'Etat pour des emprunts contractés par les communes en difficulté auprès de banques privées. Mais pour que les prêts soient accordés à un taux avantageux, Tel Aviv a fait jouer la concurrence. Un appel d'offre a donc été lancé en mars 2009 par le Ministère des Finances : «Quelle banque offrira le taux d'intérêt le plus intéressant ?».
Dexia Israel remporte l'appel d'offre. Le 30 juin 2009, un contrat est signé avec l'Etat israélien stipulant que Dexia Israel allouera, dans le cadre de ce recovery plan, la somme de 274 millions de shekels (environ cinquante millions d'euros) à des autorités locales israéliennes : lesquelles ?

La liste complète des communes participant au plan est reprise dans l'appel d'offre remporté par Dexia. La plupart des communes sont situées en Israël, c'est-à-dire dans les frontières de 1948. Mais cette liste reprend aussi les noms de cinq colonies israéliennes, c'est-à-dire d' implantations installées illégalement en Cisjordanie occupée, sur des terres palestiniennes. Les noms de ces colonies: Elkana - Le Conseil régional de la Vallée du Jourdain - Givat Ze'ev - Emanuel - Kedumim.

Que pouvons-nous déduire de ces documents?

Jusqu'à présent, les crédits n'auraient pas encore été versés. Est-ce que Dexia Israël aurait exigé que les cinq colonies en soient exclues, car 'contraires' au droit international et à la charte éthique du groupe ? C'est probablement ce qu'affirmera la direction de Dexia s.a.

Ce serait souhaitable, mais cela paraît malheureusement très peu probable si l'on entend les déclarations du porte-parole de Dexia Israel. Ce dernier a été interviewé début juillet 2009 par des journalistes israéliens du site web d'info économique The Marker.
Dans le cadre de ce nouveau plan et du contrat avec l'État, les journalistes lui demandaient si Dexia Israel refuserait dorénavant de financer les colonies israéliennes, conformément à ce qu'a déclaré Jean-Luc Dehaene. La réponse est diplomatique, mais laisse peu de place au doute: « Dexia Israël continuera à accorder des prêts à toutes les autorités locales israéliennes qui respectent la loi israélienne, sans aucune autre considération si ce n'est bancaire.»

La loi israélienne et la politique actuelle du gouvernement israélien encouragent la colonisation israélienne dans les territoires occupés. Dans ce contexte, et au vu de tous les éléments présentés ci-dessus, il semble clair que Dexia Israel n'entend pas rompre ses liens avec les colonies.

De deux choses l'une, soit la direction du groupe Dexia cache des informations importantes, soit elle n'a pas de réel pouvoir au sein du groupe Dexia, en tout cas pas celui d'empêcher la filiale israélienne de financer la colonisation illégale des terres palestiniens avec notre argent. Dans tous les cas, les membres de la campagne "Palestine Occupée - Dexia Impliquée" vont redoubler d'efforts au cours des prochaines semaines.

Que faire?

La campagne se poursuit jusqu'à ce que Dexia SA:

1. rompe ses liens (contractuels ou non) avec toutes les collectivités, communes, entreprises, particuliers, etc... liée à l'occupation israélienne de la Palestine;
2. reconnaisse que les colonies israéliennes implantées dans les territoires occupés palestiniens sont illégales et constituent un obstacle à la paix;
3. reconnaisse que la municipalité de Jérusalem, telle qu'instituée par les Israéliens, est illégale car elle comprend la partie Est de la ville. Cette municipalité ne doit donc pas recevoir de financement du groupe Dexia;
4. reconnaisse qu'avoir permis à une de ses filiales de financer les colonies israéliennes était une faute inadmissible présentent ses excuses pour les torts que ces financements ont causés;
5. fournisse les preuves permettant de vérifier le caractère irréprochable des activités de sa filiale israélienne.

Prochain rendez-vous de la campagne "Palestine Occupée - Dexia Impliquée":
samedi matin 3 octobre, devant plusieurs agences Dexia en Belgique.

Source: http://www.intal.be/fr/article/dexia-et-les-colonies-israeliennes-nouvelles-revelations

Un texte unitaire pour la campagne BDS

Le Collectif National pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens soutient l’appel à des sanctions contre Israël jusqu’à ce qu’il applique le droit international et les principes universels des droits de l’Homme publié le mardi 15 septembre 2009

Collectif national pour une Paix Juste et Durable entre Palestiniens et Israéliens

Le Collectif National pour une Paix Juste et Durable entre Palestiniens et Israéliens s’est attaché depuis sa fondation à organiser les mobilisations unitaires pour le respect du droit international et en solidarité avec le peuple palestinien, relayant en France les voix des acteurs engagés pour la paix et la justice.

Notre collectif s’est ainsi engagé dans la campagne palestinienne contre le Mur d’annexion israélien et pour la suspension des accords d’association Union Européenne / Israël.

Quatre ans après l’avis de la Cour Internationale de Justice qui proclame l’illégalité du Mur et de la colonisation, force est de constater que nos gouvernements n’ont pas pris les mesures nécessaires pour contraindre l’Etat d’Israël à se plier au droit international. En refusant de reconnaître le droit à un Etat pour le peuple palestinien et en accentuant la colonisation de territoires illégalement occupés, en construisant un mur au delà de la ligne verte reconnue internationalement, avec pour effet d’annexer de nouveaux territoires appartenant à la Palestine, en maintenant les entraves qui limitent gravement le droit de circulation des Palestiniens, en refusant de reconnaître le droit au retour des réfugiés palestiniens, en discriminant gravement les droits démocratiques des citoyens palestiniens d’Israël, en interdisant tout développement économique, en se rendant coupable à Gaza de crimes de guerre contre toute une population civile, déjà assiégée, appauvrie, et affamée depuis des mois par un blocus illégal, Israël s’enfonce toujours plus avant dans le déni de tous droits au peuple palestinien, en toute impunité.

C’est pourquoi le Collectif National pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, comme de nombreuses organisations à travers le monde, soutient la demande de la société civile et politique palestinienne pour que des sanctions soient appliquées à Israël, dans le cadre de l’initiative non-violente Boycott, Désinvestissement, Sanctions, jusqu’à ce qu’il respecte le droit international et les principes universels des droits de l’Homme.

Le Collectif National pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens s’engage à intensifier ses efforts pour relayer l’initiative prise par la société civile palestinienne et lui donner une traduction concrète dans ses actions. Le Collectif National appelle toutes les organisations engagées pour le respect du Droit international et la paix à rejoindre et à relayer ses revendications, tant que le droit international est bafoué :

- Boycott des produits israéliens car ils ne respectent pas les normes de traçabilité permettant de distinguer les produits en provenance des colonies illégales d’Israël dans les territoires palestiniens occupés

- Désinvestissements des entreprises étrangères tirant profit de l’occupation et de la colonisation

- Sanctions contre Israël, et en particulier suspension des accords d’association UE / Israël tant que les droits de l’Homme sont bafoués, arrêt de la coopération militaire France / Israël, embargo sur les ventes d’armes à Israël

Le Collectif National appelle toutes les organisations à mener des campagnes de mobilisation pédagogiques conservant un caractère citoyen et non violent

Premiers signataires :
- Agir contre le Colonialisme Aujourd’hui
- Alliance For Freedom And Dignity –France (AFD-France),
- Association des travailleurs maghrébins de France ( ATMF)
- Association des Tunisiens en France (ATF)
- Association France Palestine Solidarité (AFPS)
- Association nationale des élus communistes et républicains (ANECR)
- Association pour les jumelages entre les camps de réfugies palestiniens et les villes françaises (A.J.P.F.)
- Association républicaine des anciens Combattants
- Campagne Civile de Protection du Peuple Palestinien (CCIPPP)
- CICUP
- CPPI Saint-Denis (Collectif Paix Palestine Israël)
- Collectif Judéo Arabe et Citoyen pour la Paix
- Droit-Solidarité
- Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux Rives (FTCR)
- Fédération pour une Alternative Sociale et Ecologique (FASE)
- Fédération Syndicale Unitaire (FSU)
- Génération Palestine (GP)
- GUPS - Union Générale des Etudiants de Palestine
- La Courneuve-Palestine
- Le Collectif Judéo Arabe et Citoyen pour la Paix (PAOR)
- Les Alternatifs
- Les femmes en Noir
- Les Verts
- Ligue des Droits de l’Homme (LDH)
- Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP)
- Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA)
- Organisation de Femmes Egalité
- Parti Communiste Français (PCF)
- PCOF
- Solidarité Palestine 18°
- Union des Travailleurs Immigres Tunisiens (UTIT)
- Union Juive Française Pour la Paix (UJFP)
- Union syndicale Solidaires ...

mardi 15 septembre 2009

Suite de l'invraissemblable saga avec le bourgmestre de Bruxelles, F. Thielemans

Ce samedi 12 septembre (voir article publié ci-dessous à cette date), j'interpelais le collège de la ville de Bruxelles et son bourgmestre F. Thielemans sur la (dé)raison d'offrir un tapis de fleurs à la ville de Tel-Aviv...

Je recevais une réponse standardisée (commençant pourtant par ces mots: j’ai pris connaissance avec "la plus grande attention" des interrogations légitimes qu’il soulève.)

Courrier tellement administratif et infondé, que je décidais de répondre à son auteur, à savoir le bourgmestre lui-même (réponse figurant en italique dans l'article du samedi 12 dernier).

Quelle n'a pas été ma surprise de découvrir ce matin une nouvelle réponse à la mienne... identiquement la même que la première, mais se voulant toujours de la plus grande attention !

Voici donc ma seconde réponse à tant d'incurie :

Mr Thielemans,

si votre mail de ce jour n'était si lamentable, j'aurais pu croire à une mauvaise blague.
Ce genre d'attitude dans le privé se solderait par un sérieux blâme, voire même, par une démission !

Si donc vous aviez réellement pris connaissance avec "la plus grande attention à mon message", vous ne m'auriez pas envoyé votre consternante réponse une seconde fois, identique en tout point à la première.
De la sorte, chaque phrase, chaque mot que vous y utilisez perd tout son sens et n'est rien d'autre qu'une vaste fumisterie!

Ce second envoi souligne non seulement l'incompétence de vos services, mais ajoute à la désinvolture manifeste avec laquelle vous traitez les questions qui vous sont posées, ainsi que les réponses qui vous sont adressées.

Cette seconde réponse de votre part, plutôt que de vous honorer ne fait que renforcer l'image déjà désastreuse d'une classe politique trop occupée à ses petites affaires qu'aux préoccupations légitimes de ses citoyen(ne)s.

Dans tous les cas, cela confirme l'incroyable fossé qui n'a de cesse de s'élargir entre la population et la classe politique, et cela illustre combien vos déclarations préélectorales sonnent faux et sont mensongères !

Cela conforte l'idée des citoyen(ne)s que tout élu que vous êtes, vous ne nous représentez plus !

En conséquence, en lieu et place de vous présenter mes salutations, je vous inviterais plutôt à quitter vos fonctions qui me semblent amplement usurpées...


Daniel Vanhove -
Membre du Mouvement Citoyen Palestine
15.09.09