vendredi 20 mai 2011

DSK: l'ivresse du pouvoir


En première lecture, l'affaire DSK, c'est essentiellement beaucoup de bruit pour rien. Par contre, ce qui est significatif, c'est la teneur des réactions et l'absence totale de distanciation à l'information.


DSK, c'est un homme, une vie, une œuvre, le tout réduit à un acronyme bien parti pour rester dans les pages saumon de l'histoire, au chapitre pantalonnades. DSK, c'est l'antonyme du RSA, trois petites lettres qui parcourent tout le spectre de notre organisation sociale.

 À ma droite — parce que c'est bien là la place qui lui correspond le mieux — DSK, l'ex-futur-président, le toujours-maître-du-monde, l'homme blessé, lynché, lâché, le présumé innocent, dont la presse taisait depuis tant d'années les turpitudes. À ma gauche, le RSA, l'obole de l'infamie, la marque des ratés, des surnuméraires, des profiteurs dont la presse acharnée n'a de cesse de dénoncer le parasitage, cette caste de rentiers, de vautours, tous présumés coupables par défaut, coupables d'être les perdants d'un système gouvernés par les vainqueurs. Deux acronymes, deux destins vertigineusement divergents, deux traitements diamétralement opposés, l'homme de pouvoir, riche, puissant jusqu'au fond du slip griffé, contre la masse anonyme des sans-grade, des sans voix, des riens-du-tout. Deux mondes. Deux traitements. Chronique de l'iniquité ordinaire, de l'inégalité érigée en principe de fonctionnement indépassable.

Ce qui est marquant, c'est la solidarité de classe qui est à l'œuvre dans cette affaire. Aux antipodes d'Outreau. Et par là même, la négation de tout jugement de classe dans le fonctionnement même de notre société. L'habituelle rencontre entre les rednecks de la cambrousse défavorisée et les colleges guys de la ville moderne et huppée.

Mais comment pouvez-vous penser que ce grand homme est assez con pour se faire piéger par sa bite? Lui qui peut toutes les avoir?
Après le too big to fail, voici le too powerfull to rape.
Et voilà ceux qui ne remettent jamais en question la moindre version officielle, fut-elle réécrite 20 fois sous leurs yeux, ceux qui houspillent les méfiants, les dubitatifs, les pinailleurs, les voilà en train de beugler tous en chœur au complot! Parce que cela ne peut être que cela, parce qu'il n'y a pas d'autre explication.

Le monde Audi
DSK, c'est un peu comme Séguéla, la sécrétion naturelle d'une société éminemment corrompue et entièrement vouée au culte du fric et du paraître. DSK, comme tous ses petits copains de la politique-Fouquet's, il ne faut pas s'y tromper, c'est la quintessence de la pub Audi qui me fit tousser en mon temps:
Il a l'argent, il a le pouvoir, il a une Porsche Audi: il aura la femme.

Parce que franchement, à quoi ça sert d'être le maître du monde si tu ne peux pas faire strictement tout ce que tu veux? Comment penser une demi-seconde que les questions de consentement d'une boniche et autres pinailleries du genre puissent intéresser des gens tellement puissants, tellement ivres de leur pouvoir sur le reste de l'humanité, eux qui, d'un trait de plume, peuvent décider qui va vivre ou mourir, qui va manger ou crever, qui va se soigner, qui va être éduqué dans la plupart des pays du monde? DSK, c'est le maître après Dieu, c'est le grand ordonnateur des purges financières qui vont plonger des peuples entiers dans une misère que nous ne voulons même pas envisager et vous pensez vraiment qu'il considère la boniche de sa suite à 3.000 $ la nuit autrement que comme un dû, un service annexe, quelque chose entre la serviette de bain brodée et la collection de mignonnettes du minibar?

DSK n'est pas un séducteur. Ni un sex-addict. Ni un malade. Ni un con, d'ailleurs. C'est juste un homme puissant qui a intégré les codes de ses pairs, toujours les mêmes en vigueur depuis des temps immémoriaux: ce que tu veux, tu le prends. Ce n’est pas une histoire de sexe : c'est une histoire de domination sociale totale, de conscience de classe qui en placent certains au-dessus des lois et du sort du commun des mortels, de mépris de classe, aussi et surtout. C'est toujours la même vision féodale du monde, un monde d'inégalités, de brutalités, de domination où le prédateur en haut de la chaîne alimentaire a le droit de se servir : droit de vie et de mort, droit de cuissage, droit d'être au-dessus du droit !

Dans l'affaire DSK, ce qui est vraiment intéressant, c'est plutôt que, subitement, la justice de classe défaille — celle qui est habituellement lourde et expéditive avec les pauvres, indulgente et d'un train de sénateur avec les riches et les puissants —, que les passe-droits s'épuisent, que l'argent cesse de lubrifier les conflits, que l'intimidation n'ait pas suffit à faire taire, c'est qu'il y ait une affaire, justement.

Agnès Maillard
17.05.11
Source: le monolecte.fr

1 commentaire:

  1. Quelle ironie du sort!

    Le patron( plus maintenant) de l'une des institutions la plus puissante et la plus criminelle de notre planète, celle qui sème la mort, la misère, la famine et la souffrance, est trainé devant les tribunaux américains par une guinéenne.
    Une immigrée qui appartient aux petites gens-selon la caste socialo-bourgeoise dite de gauche-
    Car c'est bien de cela dont il s'agit, d'une histoire de caste, celle des grands et celle des petits.
    On se demande dans cette affaire qui est grand et qui est petit?
    Pour moi le grand c'est cette femme courage qui a osé porter plainte contre un "puissant".

    Il n' y a guère de surprise dans la façon dont le clan auquel il appartient, se dresse tel un homme pour défendre un des leurs avec une telle envergure, après tout chacun a le droit de défendre sa chapelle, non!
    Je me réserve donc le droit de défendre une des miens, appartenant à la caste des petits.

    Nous ne sommes pas à la première affaire de cette nature en France, on a eu droit au chapitre morbide, l'angolagate avec le grand manitou Pasqua, et aussi clearsteam, l'affaire Baudis et un tas d'autres affaires plus ou moins troubles qui donnent des frissons dans le dos, selon le témoignage des enfants d'un magistrat nommé Pierre Roche.

    http://www.youtube.com/watch?v=z0RMhHpFgaE

    http://www.youtube.com/watch?v=UhCoaiRmFVQ&feature=related

    http://www.youtube.com/watch?v=SRs9U7Or9p8&feature=related

    Une chose est sure, c'est qu'avec ce nouvel épisode, les médias dominants oublieront le monde musulman sur lequel ils fantasment depuis un certain temps, jusqu'au jour ou ils n'auront pas grand chose à se mettre sous la dent, il faut bien revenir un jour à ses fantasmes.

    S'il leur reste une once de conscience professionnel, devraient-ils commencer à se pencher sérieusement sur les mouvements de la jeunesse espagnole et italienne qui commence à se réveiller, des mouvements qui d'ailleurs risquent de se radicaliser dans les semaines à venir, et qui fera probablement tâche d'huile sur le reste de l'europe.

    http://oclibertaire.free.fr/spip.php?article1003

    http://fr.myeurop.info/2011/05/20/italianrevolution-l-indignation-gagne-la-jeunesse-italienne-2476

    L'affaire DSK, eh oui la symbolique est de taille!
    même si toutes les cartes ne sont pas battues, elle peut au moins apportés un peu de réconfort aux petits qui diront:"...c'est fou ce que un peu de justice fait du bien, ça n'arrive pas souvent, mais ça fait drôlement de bien..."

    Amel chergui

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