dimanche 9 mai 2010

Décès de Güler Zere


Un immense merci à tous les celles et ceux qui ont participé sous quelque forme que ce soit à la campagne pour sa libération, qui ont permis à Güler de respirer l'air de la liberté aussi éphémère fut-elle.
Güler nous a quittés mais le difficile combat pour le respect de la dignité humaine en Turquie se poursuivra.
Pour tous les militants turcs et kurdes morts (Salih Sevinel, Mehmet Kilinç, Osman Yigit,...), pour la cinquantaine de détenus qui sont actuellement à l'agonie, pour que les hommes puissent "vivre comme un arbre, seul et libre" et "vivre en frères comme les arbres d'une forêt".
Ci-dessous, un article publié dans le quotidien libéral turc "Radikal".
Merci encore et à très bientôt.

Bahar Kimyongür -

Décès de Güler Zere

Malgré les innombrables rapports médicaux et les conclusions de l’Union turque des médecins (TTB) mettant en garde contre le fait qu’elle était «à l’article de la mort» et malgré des centaines d’action de protestation, Güler Zere, prisonnière de longue date, est morte au septième mois de sa remise en liberté. Dans l'une de ces dernières lettres, elle écrivait: «Ils m'ont abandonnée sur les berges de la mort. Ils ont usurpé mon droit à la vie en me donnant le droit de mourir dehors. Je ne l'oublierai pas.»

Il y a 15 ans, à peine âgée de 20 ans, elle adhéra au Parti/Front révolutionnaire de libération du peuple (DHKP-C) et participa aux actions de cette organisation. Pour ces motifs, elle a été arrêtée et condamnée à 34 ans de prison. A l’âge de 34 ans, on  diagnostiqua chez Zere un cancer de la région palatine. En février 2009, elle fut opérée à la prison d’Elbistan où elle était détenue. Sa maladie s’est à nouveau déclarée deux mois après l’intervention médicale en raison des conditions de détention et de négligences. Avec l’aggravation de sa santé, elle fut transférée au dortoir des condamnés de l’hôpital de Balcali, faculté de médecine de l’université Çukurova.

Ne pouvant plus être soignée dans les conditions de la prison, ses avocats introduisirent le 12 mars 2009 une requête auprès du Procureur général d’Adana. Cependant, la demande de libération conditionnelle fut rejetée.

Durant le mois d’août, l’Union turque des médecins rédigea un rapport médical dans lequel on attirait l’attention sur «son extrême maigreur» due à une insuffisance alimentaire. Zere devra effectuer un trajet de 14 heures en fourgon pénitentiaire, pour effectuer les analyses médicales demandées par l’Institut médicolégal à Istanbul.

Malgré l’urgence du cas, le 28 août, l’Institut médicolégal remarqua «des documents manquants dans son dossier médical et l’absence d’un expert en oncologie dans leur service» et ajourna ses conclusions de deux mois.

Dans un rapport publié le 16 octobre, l’hôpital Balcali de l’université de Çukurova établit que «la maladie ne montre aucun recul. Elle se renouvelle et entre dans une phase irréversible». L’Union turque des médecins arriva à la même conclusion.

Entre-temps, les actions de soutien à Zere se multipliaient et se sont étendues à tout le pays. Les députés du Parti républicain du Peuple (CHP) Canan Arıtman et Malik Ecder Özdemir écrivirent même au président de la république Abdullah Gül afin qu’il usât de son pouvoir pour sa libération. Finalement, Zere fut libérée par grâce présidentielle le 6 novembre 2009.

Après sa libération, Zere put bénéficier de soins à domicile chez elle, à Küçükarmutlu, un quartier d’Istanbul.

Dans une lettre qu’elle écrivit peu après sa libération, Zere disait: «Ils ont tardé à me libérer. Ils m'ont abandonnée sur les berges de la mort. Ils ont usurpé mon droit à la vie en me donnant le droit de mourir dehors. Je ne l'oublierai pas. Et dire qu’il y a encore des détenus malades et que l’isolement continue. En réalité, l’isolement carcéral est en soi une mort.»

Finalement, Zere a été vaincue par le cancer. Elle s’est éteinte ce vendredi à 16h50.

Radikal
07.05.10

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