Alors que la liberté d’opinion est un acquis démocratique et à ce titre inscrite dans la loi, et que les moyens d’expression n’ont jamais été aussi banalisés et accessibles qu’à notre époque où Internet ne cesse d’étendre sa toile aux endroits les plus reculés de la planète, dès que des citoyens se risquent à ne pas chanter dans le ton, certains États – et pas forcément ceux que l’on qualifie habituellement d’exotiques – semblent renforcer leurs réflexes répressifs, par le biais de leur système policier.
Sans parler de l’Italie où des lois que l’on pensait appartenir au passé refont surface sans que cela ne soulève de protestations marquées de la part des autres pays européens, il semble que certains policiers de l’une ou l’autre commune de Bruxelles s’imaginent être au-dessus de la législation.
Ainsi, ce dimanche 16 août au marché du Midi près des Abattoirs, quelques militants de la cause palestinienne se baladaient au milieu d’une foule habituée à y faire ses emplettes dominicales. Leur objectif : avant le début du Ramadan, inviter la clientèle à ne pas acheter de dattes en provenance d’Israël. Erreur ! Des policiers s’enquirent de la présence de ces militants, tout en leur signifiant l’interdiction de distribuer des tracts et de porter des tee-shirts préconisant le boycott d’Israël. Étonné de ces directives inhabituelles, Nordine Saïdi voulut savoir de quelles sources elles émanaient. Avec l’agressivité verbale qu’on leur connaît hélas, la réaction policière fut violente. L’un des policiers s’adressa à Nordine en lui lançant de quoi tu te mêles !? Puis l’obligea à lui remettre sa carte d’identité tout en l’arrêtant sur-le-champ, et en lui passant les menottes sous prétexte de trouble à l’ordre public.
Bien qu’ayant fait remarquer qu’il n’y avait aucun trouble de l’ordre public mais un dialogue avec les passants afin de les sensibiliser au problème des dattes israéliennes produites dans des colonies implantées en terre palestinienne – ce qui est reconnu comme illégal par l’ensemble de la Communauté internationale et l’ONU – et malgré avoir dit que personne ne pouvait l’empêcher de militer pour le boycott de ces produits comme cela s’est pratiqué à l’époque de l’apartheid en Afrique du Sud, Nordine fut emmené au poste de police d’Anderlecht. Déjà la semaine passée, des incidents du même genre se sont déroulés sur le territoire de cette commune…
Après avoir essuyé toutes sortes de quolibets et plaisanteries humiliantes et passé plusieurs heures en cellule à attendre qu’on lui explique les motifs de son arrestation et de sa détention, Nordine Saïdi fut relâché en fin d’après-midi, sans le moindre motif, ni procès-verbal, ni la moindre justification d’une telle procédure. Pis : lors de sa remise en liberté, il dut supporter la bêtise haineuse de ces petits gradés, et s’entendre dire qu’en tant que bougnoule et terroriste, il n’avait qu’à rentrer chez lui, et aller foutre la merde dans son pays ! Et si cela ne lui plaisait pas, il n’avait qu’à se ceinturer d’explosifs, faire des braquages et se faire sauter dans son pays !
Interloqué par ces propos à caractère profondément raciste, Nordine se tourna vers une policière qui assistait à l’altercation injurieuse de l’un de ses collègues, pour demander si elle avait entendu ces propos, mais l’autre renchérit, disant que personne n’avait rien entendu parce qu’ici, on engage des sourds, "c’est pour ça qu’on a des oreillettes" ! Et les femmes ont juste le droit de fermer leur gueule !
L’on pourrait croire que ce genre d’incident est rare voire même exceptionnel. Hélas, il existe de trop nombreux témoignages pour attester du contraire. Et en tant que citoyens respectueux des lois, nous ne pouvons rester indifférents à ce type de comportement. Les forces de l’ordre sont gangrénées par ce genre d’individus qui tels de petits machos, font la loi à leur manière. Ces minables Rambo, fiers dans leur uniforme, s’imaginent être dans quelque mauvais téléfilm américain de série C où seul leur langage ordurier suffirait à les justifier.
Chacun sait combien le port de l’uniforme pousse certains à penser qu’ils peuvent tout se permettre – comme chacun sait aussi, que plus ils sont faibles intérieurement, plus ils roulent des mécaniques et versent dans l’outrance – il n’empêche que quand les dérives se multiplient, il est temps de tirer la sonnette d’alarme et de rappeler à l’ordre ces flics de l’excès de zèle. Parce que ce n’est pas la première fois que ces pandores outrepassent leurs droits. Et il convient peut-être de leur rappeler et bien leur expliquer l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'Homme qui stipule que "Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière."
De la même manière, il convient également de protester énergiquement auprès du bourgmestre de ces communes, en tant que chef de la police. Ce sont les bourgmestres qui sont priés de faire le tri entre le bon grain et l’ivraie. Ce sont eux qui doivent vérifier l’état d’esprit qui règne au sein des commissariats et des forces de police. Et ce sont eux qui sont également responsables du maintien de ce droit fondamental qui est la liberté d’opinion et d’expression de tout citoyen sur le territoire de leur commune, tant que l‘ordre public n’est pas dérangé.
La ville de Bruxelles et ce qu’elle représente, n’a que faire de pareils individus au sein de ses forces de l’ordre. Que du contraire : il faudrait les en expurger sans délai, pour avoir enfin des forces de police réellement au service des citoyens, aimables et polis envers chacun, capables d’intervenir aux moments judicieux et non de manière arbitraire, dans les conditions et sous les formes qui conviennent à chaque situation.
L’on semble bien loin du compte, dans certaines communes de la capitale de l’Europe !
Daniel Vanhove –
Membre du Mouvement Citoyen Palestine, ainsi que du Mouvement ÉGALITÉ -
Co-auteur de Retour de Palestine - 2002 - Ed. Vista
Auteur de Si vous détruisez nos maisons, vous ne détruirez pas nos âmes – 2004 –
et La Démocratie Mensonge – 2008 – parus aux Ed. M. Pietteur – coll. Oser Dire
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