Ali Aarrass extradé au Maroc!
Hier, le 15 décembre à 16h, l'Espagne a extradé le Belge Ali Aarrass au Maroc. En silence!
Personne n'a été averti: ni la famille, ni les avocats.
Cette décision se fait malgré et contre la demande (du 26 novembre 2010) du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme à Genève de ne pas extrader Ali Aarrass.
Le Haut commissariat avait donné deux mois de temps à l'Etat espagnol et aux avocats de la défense pour argumenter leur position sur l'extradition.
Cette décision vient aussi au moment où la solidarité internationale pour la libération d'Ali Aarrass prend forme à Melilla, à Londres et à Bruxelles. L'extradition s'est faite aussi deux heures après que des élus et députés bruxellois se concertaient au parlement belge pour une initiative commune contre l'extradition d'Ali.
Communiqué des avocats:
L’Espagne viole ses obligations internationales et soumet un ressortissant belge à un risque sérieux de subir la torture – les autorités belges ne réagissent pas;
Ali AARRASS est un ressortissant belgo-marocain, détenu en Espagne depuis avril 2008 suite à une demande d’extradition formulée par le Maroc. Il est soupçonné par cet Etat d’appartenir à la fameuse «cellule terroriste Belliraj»;
Ali AARRASS n’est marocain qu’en raison du fait qu’il a dû obtenir, pour voyager, un titre d’identité. L’Espagne refusait en son temps d’accorder la nationalité espagnole aux personnes nées dans l’enclave de Ceuta et Mellila et Ali AARRASS a donc dû se tourner vers les autorités marocaines. Il n’a cependant jamais vécu au Maroc. Il n’a aucun lien effectif avec ce pays;
Ali AARRASS a vécu 28 ans en Belgique, y a fait son service militaire, y a développé un commerce de proximité et des attaches profondes. Ali AARRASS est belge;
Ali AARRASS a un casier judiciaire vierge. Il a fait l’objet de deux enquêtes en Espagne pour vérifier s’il n’entretiendrait pas des liens avec des groupes terroristes. Ali AARRASS a été totalement blanchi. Durant trois ans, la justice espagnole a enquêté. Elle n’a rien trouvé à reprocher à Ali AARRASS;
Il est de renommée commune que le Maroc torture de manière systématique les individus dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, motif invoqué par cet Etat pour museler toute opposition politique pacifique. Plus spécifiquement, il est de renommée commune que le «procès Belliraj» mené au Maroc a été une véritable mascarade, une parodie de justice. Les inculpés ont été torturés pour ensuite être condamnés sur base de leurs propres « aveux », obtenus sous la torture. Des informations émanant des autorités consulaires belges et des autorités américaines, divulguées sur wikileaks, l’ont encore confirmé très récemment;
Ali AARRASS s’opposait dès lors fermement à son extradition. Il a fait trois grèves de la faim pour éviter d’être remis à ses potentiels bourreaux;
Malgré le risque manifeste et sérieux de subir torture, mauvais traitement et procès inique en cas d’extradition vers le Maroc, les autorités espagnoles ont décidé d’extrader Ali AARRASS vers cet Etat;
Interpellée par la famille AARRASS depuis l’incarcération d’Ali et informé, précisément et de manière documentée, sur les risques encourus par Ali en cas d’extradition, le Ministre des affaires étrangères belge a refusé de prendre contact avec l’Espagne, dans le cadre des relations diplomatiques entretenues avec ce pays, afin de faire part ne fut-ce que de la préoccupation des autorités belges à l’égard de leur ressortissant. Le Ministre invoquait « la confiance mutuelle » qui prévaut entre les différents Etats européens, alors même qu’il lui était démontré qu’en l’espèce, cette confiance était mal placée;
Le 19 novembre 2010, le Conseil des ministres espagnol a approuvé l’extradition du belgo-marocain Ali AARRASS. Par contre, l’Espagne a refusé d’extrader Monsieur EL BAY, détenu dans la même affaire mais de nationalité hispano-marocaine. Cet homme a été, à juste titre, libéré;
Dès lors, en dernier recours, le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies a été saisi d’une requête en extrême urgence afin d’empêcher l’extradition d’Ali AARRASS;
Au grand soulagement de toute sa famille, le Comité des droits de l’Homme a pris une mesure provisoire et a enjoint l’Espagne à ne pas l’extrader en date du 26 novembre 2010;
Depuis que le Conseil des Ministres espagnols a approuvé son extradition, soit il y a presque un mois, Ali AARRASS fait la grève de la faim. Jusqu’ici, le consul belge en Espagne avait toujours refusé de lui rendre visite dans le cadre de la protection consulaire due à tout belge se trouvant à l’étranger. Finalement, suite à l’insistance de ses conseils, une visite consulaire a été programmée pour le 14 décembre 2010. A cette date, le consul belge a été informé que cette visite ne pouvait avoir lieu : Ali AARRASS avait été extradé;
Le consul belge n’a pas pris la peine de contacter les avocats d’Ali AARRASS ou sa famille. C’est par la presse que cette extradition a été portée à la connaissance des proches d’Ali AARRASS;
En extradant Ali AARRASS malgré la mesure provisoire adoptée par le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies, l’Espagne viole manifestement ses obligations internationales1 et se range lamentablement aux côtés des Etats-voyou. Même l’Ouzbékistan, depuis 2004, accepte de respecter les mesures provisoires du Comité2;
Montserrat CARRERAS, d’Amnesty International, a déploré vivement l’attitude de l’Espagne et invité ce pays, tout comme la Belgique, à mettre tout en oeuvre afin qu’ils s’assurent qu’ALI AARRASS ne soit pas torturé ni mis au secret, et bénéficie d’un procès équitable;
Actuellement, la famille d’Ali AARRASS ne sait pas où il se trouve, ni dans quelles conditions il est détenu, ni même quel est son état de santé;
Contacté à nouveau afin d’apporter la protection diplomatique auquel Ali AARRASS a droit, le Ministère des Affaires Etrangères belge se retranche derrière la double nationalité d’Ali AARRASS pour continuer à ne rien faire. Il est pourtant simplement demandé à la Belgique d’interroger la Maroc quant à la situation d’un de ses ressortissants et de solliciter de pouvoir lui rendre visite pour s’assurer qu’il est en bonne santé;
L’attitude honteuse de l’Espagne, et l’inertie coupable de la Belgique ne resteront pas sans suite. Les lois pénales européennes répriment sévèrement ceux qui pratiquent la torture, et ceux qui s’en rendent passivement complices. Nous étudions actuellement les possibilités d’introduire des poursuites pénales ou civiles contre les agents de ces Etats européens qui collaborent allègrement avec le Maroc et ses pratiques odieuses.
Aujourd'hui, nous lançons un appel urgent à tous les élus bruxellois à prendre leur responsabilité, de faire une déclaration commune et d'interpeller d'urgence le ministre Vanackere sur l'abandon complet d'un citoyen belgo-marocain.
Nous lançons un appel à tous les sympathisants de la cause d'Ali Aarrass à se retrouver demain:
vendredi 17 décembre de 12h à 14h et ensuite 16h à 18h devant le Ministère des Affaires Étrangères
rue des Petits Carmes 15
1000 Bruxelles
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