mardi 16 mars 2010

Pitoyable ploutocratie européenne…




Ainsi donc, nous apprend Le Monde en ligne de ce samedi 13 mars, la Vice-présidente de la Commission européenne et Haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité – excusez du peu ! – Mme Catherine Ashton, baronne britannique sortie d’on ne sait quel chapeau de l’un des pays les plus eurosceptiques de l’Union et toujours bien aligné sur la politique guerrière de l’empire US, se dit «très préoccupée» par l’annonce du ministère israélien de l’intérieur d’un projet de construction de 1.600 nouveaux logements dans un quartier de Jérusalem-Est… À la lecture de cette contrariante information, l’on ose à peine imaginer la tête de celle qu’un simple  sourire transforme déjà en grimace ! Ainsi, malgré la pléthore de fonctionnaires et gratte-papiers surpayés qui grouillent dans les dédales des institutions européennes, découvrirait-elle soudain l’arbre qui cache la forêt ? Il serait opportun dès lors, de la documenter sans tarder sur les projets sionistes en question et de lui conseiller la lecture – à la source, comme on dit – du journal de gauche israélien Haaretz faisant état de projets totalisant 50.000 nouveaux logements dans la partie Est de Jérusalem dans les prochaines années, pour une population estimée à 200.000 nouveaux colons !…
(http://www.haaretz.com/hasen/spages/1155639.html)

Dans la foulée, la présidence tournante de l’UE – vous savez, ce carrousel pour grands enfants nantis  qu’il convient ainsi de ne pas froisser – assurée pour l’instant par l’Espagne, s’est même «montrée inquiète» de la chose ! Si,si… le ministre espagnol des affaires étrangères Miguel Angel Moratinos allant jusqu’à déclarer que «…si nous attendons encore deux ans, il sera trop tard, parce qu’il n’y aura plus de territoires à négocier…» Perspicace, n’est-ce pas ?!

Après ces annonces musclées, nous, citoyens démocrates européens, ne pouvons qu’être admiratifs de nos élites… C’est vrai, après de telles déclarations, nous pouvons enfin nous sentir fiers et constater à quel point nos multiples et innombrables représentants politiques ont pris toute la mesure et l’étendue du problème. Et nous pouvons finalement dormir sur nos deux oreilles, sachant que dorénavant nos éminences vont agir, puisqu’elles se disent «préoccupées»… C’est dire si l’Etat hébreu peut bien trembler sur ses bases désormais, devant tant d’unanimité et de détermination européennes !

Cependant, une question me taraude et n’a de cesse de m’encombrer l’esprit : si après plus de soixante deux ans d’injustice flagrante faite au peuple palestinien, la toute fraîche représentante de la diplomatie européenne ne semble être que «préoccupée» par la situation, ne faudra-t-il pas encore bien des années et de nombreux éléments à charge de la politique coloniale d’Israël pour que l’Europe passe du registre de la  «préoccupation» à celui des sanctions, comme il en est question  pour tout autre État violant de manière si flagrante, le Droit international et humanitaire depuis des décennies? Cherchez l’erreur…

Pour preuve du grand cas que fait Israël de ces discours vains et creux d’une diplomatie européenne aussi disparate et encombrée qu’inutile, la réaction dès le lendemain dimanche du 1er Ministre israélien Netanyahu «minimisant» déjà la récente polémique à propos de ces 1.600 nouveaux logements, fort sans doute de la dernière déclaration renouvelée de l’administration américaine par l’intermédiaire de son Vice-président Joe Biden lui-même à «l’engagement total, absolu et sans réserve à la sécurité d’Israël». (http://www.liberation.fr/monde/0101623523-les-etats-unis-reiterent-leur-soutien-total-a-la-securite-d-israel). Ce qui devrait quelque peu «préoccuper» la chère baronne et ses gens, après cette autre déclaration émanant du professeur israélien Martin Van Karfeld, spécialiste en histoire militaire, lors d’une interview diffusée sur la 7è chaîne sioniste au cours de laquelle il a dit : «Israël se verra obligé de détruire le continent européen, au cas où il est menacé d’effondrement total...» (http://e-s-g.blogspot.com/2010/03/israel-se-verra-oblige-de-detruire-le.html)... Et alors, quoi !? Dans un tel scénario, bien moins improbable que les exécrables fictions dont nous abreuve le cinéma hollywoodien, l’engagement dont parle le Vice-président Biden irait vers qui : le minuscule Etat d’Israël ou l’Europe ? Quand il est dit dans ce monde décidément malade, que la réalité dépasse la fiction, je laisse à chacun le soin d’imaginer la suite…

Dans tous les cas, si j’étais au gouvernement israélien, je me dirais qu’il reste encore un certain laps de temps pour poursuivre la politique de colonisation menée actuellement, et qu’à l’horizon des deux années déjà concédées par M. Moratinos, il sera toujours de temps d’évaluer en quels termes  l’Europe passera du stade de la «préoccupation»… à celui probable et déjà prévisible de la «vive inquiétude», ou quelque chose dans le genre selon la terminologie aseptisée et émasculée de tout ce beau monde virevoltant dans un univers de plus en plus éloigné des réalités de terrain. Au fond, dans cet incommode et contrariant dossier palestinien, «tout va très bien, Madame la marquise baronne, tout va très bien, tout vaa trèès bien…» ! Et il ne faut pas être devin pour pronostiquer que votre visite de ces prochains jours dans la région, ne changera rien à l’affaire, étant entendu qu’il s’agit, in fine, de populations arabes, fort éloignées sans doute de nos vos critères communautaires de rehaussement des statuts que seules méritent nos identités européennes ou apparentées

Plus sérieusement, dans cette hypocrisie et cette lâcheté totales de nos instances, que vous y ajoutiez votre grain de sel ou non, une chose semble claire : que l’État d’Israël profite bien de ces quelques années qu’il lui reste encore pour apprécier la quiétude et l’impunité dans lesquelles il baigne… parce que les évènements se retourneront bientôt contre lui. Le temps dont il est persuadé qu’il joue en sa faveur dans sa guerre «inachevée» pour la «reconquête» de son territoire, finira par l’engloutir de la même manière qu’il est occupé à engloutir lentement mais sûrement les USA malgré leur toute puissance affichée et déployée un peu partout sur la planète… Il suffit de prendre le recul historique suffisant pour voir combien de fois cette thèse s’est vérifiée, quelle que soit la puissance en place. Ne pas (vouloir) le voir et ne pas en tenir compte  conduit inévitablement à prendre des initiatives erronées. Et ne peut qu’entraîner un peu plus vite, à une irrémédiable chute…

Daniel Vanhove

14.03.10
Observateur civil
Membre du Mouvement Citoyen Palestine
Auteur de Si vous détruisez nos maisons, vous ne détruirez pas nos âmes - 2004
et de La Démocratie Mensonge – 2008 parus aux Ed. Marco Pietteur – coll. Oser Dire

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