jeudi 12 août 2010

Assassinat d’Hariri : La piste occultée




Qui a tué Rafic Hariri et pourquoi est-il mort? Ces interrogations, qui renvoient à la question fondamentale de tout roman policier, sont bien à la base de toute enquête sérieuse: à qui le crime commis le 14 février 2005 profite-t-il?




L’enquête, dirigée par un procureur allemand au lendemain d’un attentat particulièrement bien organisé, a d’abord accrédité la thèse d’une responsabilité syrienne dans la mort du Premier ministre et leader du Courant du futur.

A lire les médias occidentaux dans les semaines qui ont suivi la mort de Hariri, il ne faisait guère de doute que Damas avait joué le rôle clé dans un scénario destiné à débarrasser la scène libanaise d’un acteur résolument pro-occidental. Le rapport Mehlis, du nom d’un procureur à la compétence discutable et à la partialité avérée, confortait cette théorie fondée sur des témoignages qui se sont vite révélés de pures affabulations. Il n’empêche que les pressions et les menaces se sont exacerbées contre la Syrie, obligeant ce pays à retirer ses troupes du Liban. Devant l’inconsistance scandaleuse des conclusions du procureur Mehlis, le Conseil de sécurité de l’ONU décide, le 30 mai 2007, de la création du Tribunal spécial pour le Liban (TSL), qui devrait remettre un acte d’accusation dans le courant de l’automne. Ce même tribunal a décidé de libérer 4 généraux libanais incarcérés sur la base de faux témoignages.

La suspicion que ce tribunal sert des objectifs autres que la vérité est plus que légitime. Depuis plusieurs semaines, des rumeurs - déjà fuitées dans Der Spiegel l’année dernière - tentent clairement d’incriminer des dirigeants du Hezbollah. Cela a fait monter la tension dans un pays encore très fragile, où des alliances féodales de nature ouvertement clientélistes dominent la société.

Les manipulations, gravissimes, qui ont entouré les enquêtes, ont poussé le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, à livrer des éléments troublants sur les agissements de l’armée israélienne dans les jours qui ont précédé l’attentat. Les mouvements de l’aviation israélienne et de drones qui surveillaient les allées et venues du Premier ministre assassiné ont été observés minutieusement par la résistance. Celle-ci a pu capter les images transmises par les drones aux salles d’opérations israéliennes. Hassan Nasrallah, ménageant sa communication, a assuré que d’autres éléments étaient en possession du Hezbollah.

Certes, les éléments fournis par Nasrallah ne constituent pas des preuves décisives, mais ils forment un faisceau de présomptions suffisamment consistantes pour justifier une enquête. Pour des raisons totalement aberrantes, les «enquêteurs internationaux» ont décidé, d’emblée, sans le moindre examen, que la piste israélienne serait exclue. Elémentaire?

Comme si le track-record des Israéliens en matière de meurtres ciblés et d’attentats terroristes n’est pas suffisamment établi. Qui aurait intérêt à déstabiliser le Liban et à y provoquer une guerre civile, sachant que ce petit pays est un grand bastion de la résistance à l’hégémonie israélienne? Qui aurait intérêt à discréditer le Hezbollah?

A moins d’être politiquement motivé, aucun enquêteur raisonnable ne peut occulter qu’Israël, dont les services secrets sont très actifs, est un suspect de premier rang. La récente mise au jour d’un réseau massif d’espions, plus de cent personnes dont un général à la retraite, donne une idée de l’ampleur des activités subversives israéliennes au Liban. Les médias occidentaux se sont empressés de réduire l’importance des informations divulguées par le Hezbollah, préférant relayer les commentaires indignés des dirigeants de Tel-Aviv. Ces derniers jouent sur du velours: l’assassinat, le 20 janvier dernier, d’un dirigeant du Hamas à Dubaï, où des tueurs israéliens ont été identifiés par la police de l’Emirat, est quasiment effacé des mémoires.

K. Selim 
11.08.10
Source: Le Quotidien d’Oran

Note:
Dans mon dernier livre: La Démocratie Mensonge, paru en 2008 (Ed. M. Pietteur) j'écrivais ceci:
"Non seulement, les exemples de cette désinformation sont quotidiens, mais ils sont régulièrement mis à jour, adaptés en fonction des évènements et des intérêts poursuivis. Ainsi, de l’assassinat de Rafiq Hariri, l’ancien Premier ministre du Liban. Instantanément (le hasard, vraiment?), les médias se sont focalisés et donc les regards orientés vers la Syrie. Tant les diplomates israéliens qu’américains, mais aussi européens, se sont entendus pour désigner cette dernière comme directement responsable du complot. Cependant, à bien y regarder, le dernier pays qui pouvait tirer avantage d’un tel attentat était sans aucun doute la Syrie! (...) Cela n’a aucun sens, mais en revanche, illustre de manière évidente, la manipulation médiatique dont nous faisons les frais, à tous les coups!" 
Daniel Vanhove

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire