lundi 1 février 2010

La "Fronde"





Une Révolution ? Pas du tout ! Une révolte alors ? Pas même !… Une Fronde ! Tout juste !

Devant le déferlement continu de l’imbécillité du pouvoir exécutif qui, tous les jours un peu plus, s’approche du stade de la mégalomanie et de la paranoïa, la classe politique et les institutions de la République commencent à réagir de manière significative.
Un exécutif pratiquant le culte de la personnalité, accumulant les gaffes, étalant une telle incompétence et un tel mépris des principes supposant fonder la République,… le tout servi par une Cour peuplée de courtisans tous plus serviles et stupides les uns que les autres, ne peut que faire réagir jusqu’aux hautes sphères de l’État. Un frémissement institutionnel qui touche le Conseil Constitutionnel, le Sénat, la Magistrature – l’Assemblée Nationale étant trop bien quadrillée par les godillots aux ordres. Cette «fronde» n’a pas échappé à certains médias qui s’engouffrent dans l’évènement et, comme à leur habitude, le grossissent, voire en font des scoops.
Et pourtant !...

Révolte… vous avez dit Révolte !
La République dans sa sagesse infinie, et surtout son habileté, a su créer les véritables antidotes à ses propres dérives,… et ce toujours au nom du Peuple souverain et des principes qui la fondent et l’animent. Ainsi soit-il ! La décadence du système marchand, allié à un exécutif particulièrement dégénéré, font que ce «bel ensemble» qu’est la 5è République, devient peu à peu un édifice apparemment branlant. La colère sociale en rajoute pour donner une image de plus en plus dégradée de ce qui se veut être un édifice démocratique et «moderne» ( ?), mais qui n’est en fait que le «cache sexe» d’un système marchand décadent.

Ce qui peut paraître paradoxal c’est que des institutions aussi poussiéreuses et rétrogrades que sont le Sénat, le Conseil Constitutionnel, la Magistrature semblent – je dis bien «semblent» - jouer le rôle de la subversion. En fait, point de subversion pour ces institutions, seulement des craintes,… des règlements de comptes et des défenses corporatistes qui prolifèrent dans cette ambiance fétide.
Au moins pour le Sénat, la contestation recoupe les intérêts de gangs politiques qui se disputent le Pouvoir. Véritables sinécure pour politiciens fatigués (des noms ?), jeunes arrivistes à l’échine souple ou aux intérêts, parfois familiaux, bien placés (des noms ?), et même politiciens véreux à qui on donne un fromage pour les faire taire (des noms ?), cette «haute assemblée» défend les intérêts de ceux qui la font exister : les partis politiques et les élus locaux. Ce qui explique son réveil soudain à propos de la Réforme des Collectivités Territoriales.

Le Conseil Constitutionnel, que l’on nous présente, à la fois comme un conseil de Sages (sic) et comme étant au bord de l’insurrection ( ?) est lui aussi un panier de crabes – financièrement juteux, pour politiciens, ou bon serviteurs, recyclés. Il est de notoriété publique que sa «majorité» chiraquienne et «anti sarkozy» en fait une «machine de guerre» dans la guerre de clans que se livrent les fractions du pouvoir.

Quant à la magistrature, de plus en plus couchée, voire «carpétisée», institution qui n’a jamais brillée par son indépendance et son «esprit de révolte», c’est plus les intérêts corporatistes menacés par la «réforme judiciaire» - au demeurant parfaitement scandaleuse - qui la mettent en émoi que l’intérêt réel des justiciables,… Même si certains magistrats font preuve d’indépendance et s’en tiennent à une éthique professionnelle qui les honore.

Je n’aborderai pas le cas de la Police qui est un cas désespéré et désespérant. On comprendra que dans ces conditions, la Fronde des institutions n’est pas prête d’accoucher d’un changement social. De fait, cette «fronde» entre parfaitement dans la stratégie des groupes politiques qui se disputent le pouvoir.

Le spectacle de la politique
Cette «Fronde» n’est qu’une facette du spectacle de la politique servant à la fois à donner le change à un citoyen naïf qui croit voir là «fonctionner la démocratie» et aux gangs politiques pour se placer en vue des échéances électorales, dont les citoyens naïfs seront les pions, pour fonder la légitimité de leurs nouveaux maîtres. Paradoxalement, ce spectacle qui n’est que le reflet de rapports de forces entre représentants des possédants – les politiciens professionnels – est présenté au bon peuple par ceux-ci comme le «fonctionnement normal de la démocratie», et la «garantie des droits politiques et des libertés fondamentales». Rien que ça ! Le problème c’est que ça marche… tout le monde, ou du moins une grande partie, y croit.

Les groupes de l’opposition officielle – celle représentée dans ces institutions – font les choux gras de cette «révolte de palais»… Elle permet de les mettre en scène sans grands risques et de les faire apparaître comme progressistes… alors qu’il est évident que les mesures et réformes prises aujourd’hui seront maintenues quand cette «opposition» reprendra le pouvoir.
Les médias toujours à l’affût du sensationnel, en rajoutent, et font de ces escarmouches entre bureaucrates de la politique la quintessence de la vie sociale et politique. Profitant de «petites phrases» habilement distillées par leurs auteurs, sur les conseils de spécialistes de la communication, elles font de ceux-ci des vedettes médiatiques qui encombrent les soirées du petit écran dans des émissions «pipeules», ou à vocation de «débat et réflexions politiques»( ?). Suit un sondage le lendemain qui dit au peuple ce qu’il pense en réalité ou ce qu’il «devrait en penser». Le bon peuple «marche», en connaisseur, dans ces nouveaux jeux du cirque, persuadé qu’il aura le dernier mot. On est en démocratie ou pas ? Et quiconque en doute est un anti démocrate. Ben voyons !

Toute cette opposition, finalement sans enjeux essentiels, n’a qu’un seul et unique but : jouer sur les incohérences et contradictions du pouvoir en place et préparer la nouvelle redistribution des places, des privilèges, des fauteuils et strapontins du pouvoir, central ou/et décentralisé. Cette fausse ambiance «insurrectionnelle», entretient un climat d’excitation dans le bon peuple qui le rend plus à même de participer aux «agapes démocratique», les élections,… dont seuls les politiciens tirent tous les avantages, la légitimité et des siège,… et bien sûr le pouvoir.

Faire oublier l'essentiel
Cette ambiance au parfum «fin de règne» ou décadence d’un système, ne doit pas nous faire oublier l’essentiel : il n’y a pour l’instant, aucune alternative crédible. Toutes les cartes, ou la plupart, sont entre les mains des pouvoirs institués, ou institutionnellement potentiels, qui n’ont qu’un seul but : assurer la pérennité du système marchand.
Les trépignements médiatiques des «révolutionnaires» et autres «alternatifs» aboutissement inéluctablement, malgré les «gros yeux» et les «discours radicaux», et au grand soulagement des tenants du système en place, à prendre, finalement, le chemin des urnes… même s’ils s’en défendent. Il suffit de voir comment tous préparent fébrilement, dans des marchandages interminables, et autres «crêpages de chignons», les élections en promettant «monts et merveilles» à l’électeur qu’ils veulent séduire. La lutte des places, avant la lutte des classes.

Ce n’est pas en expliquant seulement la perfidie du système, ce qu’il est toujours bon de faire, ni en adoptant les règles du marketing politique, que l’on «convaincra» le plus grand nombre qui, en l’absence d’alternative crédible, se retournera, par faiblesse, lâcheté et légitimisme vers les maîtres qui le dominent, et d’une certaine manière, le fascinent, négativement et/ou positivement.
Les élucubrations des politiciens qui s’agitent et jouent les «rebelles» sous les lambris des palais de la République, ne sont que les épiphénomènes des luttes que se livrent les fractions et les gangs pour le pouvoir. Tout cela n’a rien à voir avec les vrais questions qui se posent à la société civile : la répartition des richesses produites et leurs conditions de production.

À la course épuisante, ruineuse et vaine, aux scores électoraux, aux combats à «fleurets mouchetés» des politiciens, au spectacle mystificateur des pseudo conflits entre tenants du pouvoir, préférons la création d’alternatives concrètes, sur le terrain et impliquant toujours plus de monde dans leurs conditions de luttes et de vie quotidienne.

Patrick Mignard
Janvier 2010

Source: Altermonde-sans-frontières

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