mercredi 25 novembre 2009

A chacun ses indignations !

Les 20 ans de la chute du mur de BERLIN ont été abondamment traités, par l’ensemble de nos médias. Notre mémoire a été ravivée, rafraîchie. Nous ne risquons pas d’oublier cet évènement et même le plus cancre d’entre nous en histoire contemporaine ne peut désormais en ignorer les détails et le déroulement.

La grande messe de la pensée unique nous a servi, dans un rituel prévisible une page d’histoire formatée, consensuelle mais surtout déconnectée du contexte historique réelle. Cadrer nos émotions, nos indignations et nos révoltes sur un sujet bien ciblé, exploiter un fait historique sans donner tous les outils nécessaires à une analyse objective, raviver au passage notre anticommunisme des fois qu’il s’émousse avec le temps, bref tous les artifices de la manipulation de masse ont été mis en action.

Ce retour de propagande n’est pas un hasard, il arrive en pleine période où le capitalisme ne fait plus recette, empêtré dans son orgie financière, il est incontestablement incapable de relever les défis sociaux de notre époque.

Un besoin de solutions alternatives plus collectives, plus partageuses s’impose chaque jour sur l’ensemble de la planète, Le dollar, arme financière de la suprématie Américaine, n’est plus la monnaie favorite des échanges commerciaux, et seul le militaire par l’intermédiaire de l’Otan permet aux pays libéraux de s’imposer dans les régions les plus stratégiques du monde.

S’il devient évident que l’épanouissement des femmes Afghanes n’est pas l’objectif premier de ces guerres, il apparaît également difficile d’imputer à la RDA le bombardement de civils Afghans venus se ravitailler en essence autour d’un camion citerne.
Mais ce n’est pas non plus la RDA qui occupe ce pays contre sa volonté et qui a formé, et financé les mouvements religieux les plus intégristes afin de renverser la république démocratique d’Afghanistan, et ce, bien avant l’entrée des soldats soviétiques.
La RDA n’a aucune responsabilité sur le million de morts Irakien et la destruction de ce pays.
La RDA ne projette pas non plus d’envahir l’Iran, le Pakistan, elle n’a pas bombardé non plus l’Ossétie et n’a pas colonisé les territoires Palestiniens. La RDA n’existe plus. Un sondage récent effectué sur la partie EST de l’actuelle Allemagne a pourtant donné une majorité de citoyens regrettant le socialisme dans ce pays. Même si ce résultat bouscule un peu les réflexes anticommunistes habituels, l’opinion de ses gens est respectable et aurait mérité dans une démarche intellectuelle honnête d’être souligné.

Concernant les festivités de Berlin, les médias nous ont bien fait passer le message : la République Démocratique Allemande enfermait les Berlinois de l’Est derrière un mur dissimulant bien évidemment un enfer quotidien. C’est simple, le décor est posé et on reste surtout cohérent avec l’histoire néolibérale telle qu’elle nous a été inculquée dans les pays capitalistes.

L’histoire est pourtant bien différente et cette propension à prendre le grand public pour un écervelé devient à la longue insupportable. Encore une fois, il est nécessaire d’essayer de rééquilibrer le débat pour au moins laisser à chacun son libre arbitre et la possibilité de se documenter par soi-même.
D’abord il est important de préciser que quelles que soient ses opinions, tout le monde ne peut que se réjouir de la réunification des deux Allemagnes. Des familles entières séparées par l’histoire se sont enfin retrouvées et il est incontestable que la chute du mur de Berlin restera un évènement historique majeur de notre siècle.
Ensuite le propos n’est pas d’exempter de toutes critique l’ancienne RDA et son mode de fonctionnement mais de rappeler que le partage de l’Europe et la naissance du pacte de Varsovie sont des conséquences directes de la deuxième mondiale et la question « indignation et colères », il y a de quoi faire !

Juste pour remettre un peu les pendules à l’heure, c’est quand même l’extrême droite fasciste qui au bas mot a détruit les trois quarts de l’Europe et massacré 40 millions de ses habitants. Je ne suis pas sûr que notre mémoire collective n’ait forcément connaissance que ce chaos monstrueux qui restera quand même la plus grande horreur jamais organisée par l’homme n’ait pu exister que par une trahison incontestable des milieux financiers de l’époque qui ont consciemment contribué au réarmement de l’Allemagne Hitlérienne. Plutôt Hitler que le front populaire clamait sans complexe les grands groupes capitalistes européens de l’époque. L’objectif était double : briser les mouvements populaires de gauche et particulièrement le rôle prépondérant des partis communistes d’Europe et se débarrasser par la même occasion de l’URSS en poussant Hitler à entrer en guerre avec ce pays.

Le capitalisme Américain n’a d’ailleurs pas été en reste puisqu’une grande partie du patronat Américain des années 1930 / 1940 était pro Hitler.

« Des documents irréfutables prouvent qu’une grande partie des sociétés US ont carrément collaboré avec Hitler, et pas seulement au début de la guerre : Pour les capitalistes Américains, la guerre en Europe était source d’enrichissement ».

Ce jeu cynique ne cessa que lorsque l’URSS vainquit Hitler. Alors seulement, les Etats-Unis se précipitèrent pour sauver leurs intérêts en Europe. (1)

Plus pervers, on notera cette phrase hallucinante du constructeur automobile américain :
Henry Ford : "Ni les Alliés, ni l’Axe ne devraient gagner la guerre. Les USA devraient fournir aux deux camps les moyens de continuer à se battre jusqu’à ce que tous deux s’effondrent." (1)

La signature honteuse des accords de Munich en Septembre 1938 et trois mois plus tard, la signature du pacte d’amitié franco allemand par le ministre français Bonnet, scelle définitivement la trahison du Capitalisme envers les peuples d’Europe.
La France, de concert avec la Grande-Bretagne, allaient faire leur possible pour empêcher la conclusion d’un accord de sécurité collective avec l’URSS contre l’Allemagne. La proposition de l’URSS sera complètement ignorée, reconnaîtra d’ailleurs Churchill bien plus tard.

En Août 1939, L’URSS, isolée face à Hitler, signe le fameux pacte de non agression avec l’Allemagne (et non pas « d’alliance » comme des gens peu scrupuleux de l’histoire l’ont souvent présenté.), répit nécessaire pour faire fonctionner les usines d’armement, l’URSS n’ayant pas à l’époque les moyens militaires à la hauteur de ceux de l’Allemagne. Le 25/08, en France, Daladier interdit par décret le journal l’Humanité.
Le 26/09, le même Daladier décrète l’interdiction du Parti Communiste Français ; ses élus sont sommés de renier leur idéal sous peine de déchéance. Idem pour les dirigeants syndicaux.

Septembre 1939 : Début de la guerre et de son cortège d’horreurs, de persécutions raciales mais aussi politiques où les principales victimes sont les communistes, mais aussi les socialistes, les gaullistes et les antifascistes de toutes tendances.

Mon propos n’est pas de dérouler toute la deuxième guerre mondiale car il y a évidemment beaucoup de choses à dire sur les crimes des Nazis et des forces de droite collaboratrices, mais de mettre en lumière que l’ennemi du monde de la finance, était et a toujours été le monde Communiste et non pas l’idéologie fasciste.

C’est d’ailleurs l’URSS qui a payé le plus lourd tribu à la barbarie fasciste (20 Millions de morts).
Mais c’est également l’URSS qui a imprimé le véritable tournant à la guerre grâce à deux batailles titanesques : la bataille de Stalingrad en février 1943 et la bataille de Koursk en juillet 1943. Les soviétiques ont perdus 1 600 000 soldats au cours de ces deux batailles soit 10 fois plus que les alliés sur le front de Normandie ; les pertes Allemandes ont été de 900 000 hommes soit presque 5 fois plus que sur le front de Normandie. C’est seulement après les victoires russes sur le front Est qui ont fortement modifié le rapport de forces dans cette guerre que le débarquement en Normandie a été décidé (Août 1943) afin, entre autre, de ne pas laisser seuls les Soviétiques victorieux à Berlin.

Il ne s’agit évidemment pas de jeter la moindre ombre sur le souvenir de tous ces soldats alliés sacrifiés sur nos plages de Normandie car ils font partis intégrante des victimes de cette folie, mais de montrer que l’histoire qu’il nous reste aujourd’hui est plus proche d’un mythe que d’une réalité, bien plus cynique et calculatrice que tout ce que notre mémoire a appris à conserver. D’ailleurs au lendemain de la guerre, lorsque l’on interrogeait les gens sur le Pays qui avait été le plus déterminant dans la victoire sur le nazisme, plus de 70 % des gens pensaient que c’était l’URSS. Aujourd’hui, désinformation oblige, si l’on pose la même question, ils ne sont qu’à peine 20 %. La guerre a pourtant été gagnée sur le front de l’Est et non pas en Normandie. Mais cela n’empêche pas qu’aujourd’hui pour beaucoup de jeunes Américains, le camp de concentration d’Auschwitz est situé en Allemagne et a été libéré par les GI américains alors qu’en fait il est situé en Pologne et c’est l’armée rouge qui a libéré ce camp.

Quel rapport avec le 20ème anniversaire de la chute du mur et ces évènements ? D’abord il me paraît illusoire de comprendre le monde d’aujourd’hui sans une relecture approfondie des grands évènements géopolitiques de notre siècle, ensuite pour montrer que vu du côté des pays Socialistes, le monde capitaliste est un prédateur et que c’est avant tout dans cet esprit que le mur a été construit : Rappelons que dans les années 1950 la RDA n’a eu de cesse de déposer des recours auprès de l’ONU pour les multiples agressions perpétrées sur son sol par la RFA. L’économie a subit de plein fouet les conséquences de cette bataille : sabotage, espionnage, diffusion de fausses nouvelles, embargo, évasions de capitaux, vol de brevets, création de pénuries artificielles, attentats. . .
D’ailleurs, dans l’histoire des révolutions, les pays dans le monde qui ont tentés de s’affranchir du capitalisme ont systématiquement du faire face à des contre-révolutions violentes et surtout abondamment financée. Le Honduras en a d’ailleurs fait récemment les frais par un coup d’Etat militaire soutenu par les USA.

L’objectif n’est pas de donner une image d’Epinal des pays Socialistes. Je crois profondément que tout système, toute organisation humaine, politique ou religieuse a des comptes à rendre à l’histoire y compris les anciens pays du pacte de Varsovie. Mais l’acharnement avec lequel l’image du Socialisme est systématiquement caricaturé et falsifiée frise à mon sens la plus complète indécence au regard de la façon dont le monde d’aujourd’hui été façonné par le Capitalisme depuis maintenant plus d’un siècle. Arrêtons de toujours demander aux communistes de faire une introspection sur leurs idéaux alors que le bilan social, économique écologique, humain du capitalisme est pitoyable. Les guerres coloniales d’aujourd’hui se font dans la plus grande indifférence, le camp de Guantanamo n’est toujours pas fermé, la Colombie détient toujours le triste record au niveau des meurtres de syndicalistes, Israël continue le rapt des terres Palestiniennes, l’Afrique n’en finit plus de mourir, Cuba reste le seul pays au monde à subir un embargo économique aussi injuste que pénalisant bien que dénoncé régulièrement par les instances de l’ONU. Les écarts de richesse entre les possédants et les peuples du monde n’a jamais été aussi important.

Je regrette que les journalistes, les intellectuels, les chroniqueurs qui ont été si bavards pour l’anniversaire de la chute du mur restent bien silencieux sur ces autres sujets.
La mise à plat des dossiers les plus brûlants de notre histoire, si elle se fait un jour, sera une quête longue et difficile mais elle semble pourtant incontournable si l’humanité a la prétention de se projeter dans l’avenir.

Frédéric Juignet
24.11.09
(1) Extrait du site de M.Collon (d’après le livre de J.Pawels « Le mythe de la bonne guerre »).
Source: Le Grand Soir

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