Luk Vervaet, enseignant de néerlandais à la prison de Saint-Gilles, se voit refuser l’accès de toutes les prisons belges depuis le 10 août, et ceci sans explication aucune, pour «raisons de sécurité». Ce que contiennent ces "raisons" ne lui a toujours pas été communiqué. Ses questions dérangeantes et ses nombreuses déclarations publiques à propos des situations intolérables dans les prisons belges seraient-elles un risque pour la sécurité? Ou son engagement autour de l’affaire Bahar Kimyongür? Ou plutôt ses visites à l’ex-footballeur “terroriste” Nisar Trabelsi? L’opinion publique connaît la surpopulation carcérale et ses conséquences catastrophiques dans les prisons belges, souvent clouées au pilori par des rapports internationaux, mais nous pouvons supposer que les instances responsables ne souhaitent guère une dénonciation supplémentaire.
Et si en outre, cette dénonciation porte sur les “prisons dans les prisons”, ces quartiers de haute sécurité exportés par les Etats-Unis après le 11 septembre 2001, alors l’accusateur devient presque naturellement persona non grata.
Nous pouvons comprendre que les autorités soient devenues très nerveuses après tant d’évasions, mais le fond de l’affaire est que Luk Vervaet est un activiste des Droits de l’Homme pour les détenus. Pour les autorités, il est devenu gênant et indésirable.
Dans le climat actuel de “lutte contre le terrorisme”, le vague motif “pour raisons de sécurité” est l’alibi parfait pour le viser et, qui sait, lui imposer une sourdine. Luk Vervaet risque par ailleurs de perdre son travail, car son employeur, l’asbl Adeppi, dépend de la bonne volonté de la direction des prisons et des autorités pénitentiaires belges. Les directions de prison peuvent, sous pression de l’échelon supérieur ou non, décider du jour au lendemain que les leçons de néerlandais ne sont plus nécessaires et toucher ainsi directement l’employeur de Luk Vervaet.
Pour toute personne suspectée de "terrorisme", les lois normales ne sont plus d’application : les traitements inhumains et humiliants ou les extraditions vers des États ne respectant pas le Droit humanitaire international sont des pratiques acceptées. La Belgique livrera ainsi Nisar Trabelsi aux États-Unis et il s’en est fallu d’un cheveu que Bahar Kimyongür, Belge de naissance, soit extradé vers la Turquie via les Pays-Bas. Apparemment aujourd’hui, celui qui entretient des contacts ou défend les droits fondamentaux de personnes soupçonnées de terrorisme, devient lui-même un suspect, c’est ce que nous apprend la suspension de Luk Vervaet. L’ironie veut qu’il est aussi un membre fondateur de la Plate-forme pluraliste pour la défense de la liberté d’expression et risque de devenir maintenant une victime de la «chasse aux activistes» que cette plate-forme entend précisément dénoncer (comme lors de la plainte d’Electrabel contre les activistes de Greenpeace, accusés de « formation de bande »). Il est inadmissible qu’une personne qui rappelle aux autorités les règles élémentaires du droit soit menacée d’interdit professionnel ; ceci est indigne d’un État de droit. Luk Vervaet n’est malheureusement pas un cas isolé. L’opinion publique doit comprendre que dans l’ère post-11 septembre s’est développé un climat où tout activiste, ONG, organisation syndicale, intellectuel critique peut être dorénavant visé.
C’est pourquoi nous protestons avec force contre l’interdit professionnel suspendu au-dessus de la tête de Luk Vervaet.
Nous demandons que sa suspension soit immédiatement levée et que l’Adeppi ne le licencie provisoirement pas.
Le CLEA (le Comité pour la Liberté d'Expression et d'Association) dont Luk Vervaet est membre, lance un appel à solidarité en vous encourageant à signer sa pétition en ligne:
http://www.leclea.be/petition/index.php?lg=fr
Merci d'être nombreux à adhérer à cet appel. Merci aussi d'en parler autour de vous.
leclea
03.10.09
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire